La mise à mort de Gaza
Par Chris Hedges
Truthdig
WASHINGTON, D.C. – Le blocus de Gaza par Israël – où les Palestiniens pris au piège ont organisé depuis sept semaines des manifestations non violentes le long de la barrière frontalière avec Israël, qui ont fait des dizaines de morts et quelques 6 000 blessés par les troupes israéliennes – est l’une des pires catastrophes humanitaires du monde. Pourtant, l’horreur qu’est Gaza est rarement décrite. Deux millions de personnes y vivent sous un état de siège israélien sans nourriture, ni logement, ni travail, ni eau ni électricité convenables. L’armée israélienne y fait régulièrement preuve d’une violence aveugle et disproportionnée pour blesser et assassiner, et presque personne ne peut s’en échapper. Le nouveau film de Max Blumenthal et Dan Cohen, Killing Gaza, offre un portrait puissant, implacable et émouvant d’un peuple largement abandonné par le monde extérieur, et qui lutte pour sa survie.
Killing Gaza sortira mardi, pour coïncider avec ce que les Palestiniens appellent le Jour de la Nakba – « nakba » signifie catastrophe en arabe – commémorant le 70e anniversaire du déplacement forcé de quelque 750 000 Palestiniens en 1948 par la Haganah, les forces paramilitaires juives, de leurs maisons dans l’Israël d’aujourd’hui. La sortie du documentaire coïncide également avec l’ouverture par l’administration Trump de la nouvelle ambassade des États-Unis à Jérusalem.
En raison de la Journée de la Nakba et de la colère suscitée par le transfert de l’ambassade à Jérusalem, cette semaine devrait être l’une des plus sanglantes des sept semaines de protestation que les Palestiniens appellent la « Grande Marche du retour ». Killing Gaza illustre pourquoi les Palestiniens, qui ont peu à perdre, se lèvent par milliers et risquent leur vie pour retourner dans les maisons de leurs ancêtres – 70 % des habitants de Gaza sont des réfugiés ou des descendants de réfugiés – et être traités comme des êtres humains.
Cohen et Blumenthal, qui est l’auteur du livre Goliath : Life and Loathing in Greater Israel [Goliath : la vie et la haine dans le Grand Israël, NdT] , l’un des meilleurs témoignages sur l’Israël moderne, ont commencé à filmer le documentaire le 15 août 2014. Les milices palestiniennes, armées d’à peine plus que des armes légères, viennent de faire face aux chars, à l’artillerie, aux avions de combat, aux unités d’infanterie et aux missiles israéliens au cours d’un assaut de 51 jours qui a fait 2 314 morts et 17 125 blessés parmi les Palestiniens. Quelque 500 000 Palestiniens ont été déplacés et environ 100 000 maisons ont été détruites ou endommagées. L’offensive de 2014, peut-être mieux décrite comme un massacre, est l’un des huit massacres qu’Israël a perpétrés depuis 2004 contre les 2 millions de Palestiniens de Gaza, dont plus de la moitié sont des enfants. Israël, qui appelle ces offensives militaires récurrentes « tondre la pelouse », cherche à rendre l’existence à Gaza si difficile que la simple survie mobilise la majeure partie du temps, des ressources et de l’énergie du Palestinien moyen.
Le film commence dans le quartier de Shuja’iyya, réduit par les Israéliens à des tas de décombres. La destruction gratuite de quartiers entiers a été, comme l’atteste le film, accompagnée de l’exécution par balle de civils non armés par des tireurs d’élite israéliens et d’autres soldats de cette nation.
« Une grande partie de la destruction a eu lieu en quelques heures le 23 juillet », dit Blumenthal, qui raconte le film, alors que les bâtiments détruits apparaissent sur l’écran, bloc après bloc. « Les forces d’invasion israéliennes se sont retrouvées sous le feu féroce des forces de résistance locales, subissant des pertes élevées et inattendues. Alors que l’infanterie israélienne s’enfuyait en pleine retraite, ils ont fait appel à l’artillerie et à des frappes aériennes, tuant au moins 120 civils palestiniens et anéantissant des milliers de maisons. »
Le film comprend une courte séquence vidéo de jeunes Israéliens, à Tel Aviv, fêtant l’assaut sur Gaza. Ce qui rappelle que le racisme toxique et le militarisme infectent la société israélienne.
« Crève ! Crève ! Bye ! » crient les adolescentes en riant lors de cette célébration à Tel-Aviv. « Au revoir, Palestine ! »
« Putain d’Arabes ! J’emmerde Mahomet ! » hurle un jeune homme.
« Gaza est un cimetière ! Gaza est un cimetière ! Ole, ole, ole, ole, ole », chante la foule à Tel-Aviv en dansant en pleine liesse. « Il n’y a pas école demain ! Il ne reste plus d’enfants à Gaza ! »
Des familles palestiniennes terrifiées se sont blotties à l’intérieur de leurs maisons alors qu’Israël a largué plus de 100 bombes d’une tonne et a tiré des milliers d’obus d’artillerie hautement explosifs sur Choudja’iyya. Ceux qui tentaient de s’échapper face à l’avancée des Israéliens étaient souvent abattus les mains en l’air, leurs corps laissés à pourrir dans la chaleur brûlante pendant des jours.
Dans le film, Nasser Shamaly, un résident de Shuja’iyya, raconte : « J’étais à l’intérieur quand ils ont commencé à raser ma maison. Ils ont abattu le mur et ont commencé à tirer dans la maison. Alors j’ai posé mes mains sur ma tête et je me suis rendu à l’officier. Ce n’était pas n’importe quel soldat. C’était l’officier du groupe ! Il n’a pas dit un mot. Il m’a juste tiré dessus. Je suis tombé et j’ai commencé à ramper pour m’éloigner d’eux. »
Shamaly, qui s’est caché dans sa maison pendant quatre jours, a eu de la chance. Son cousin de 23 ans, Salem Shamaly, qui a dirigé un groupe de volontaires du Mouvement de solidarité internationale pour déterrer des corps dans les ruines de Shuja’iyya, n’en a pas eu.
Joe Catron, l’un des membres de l’équipe de secours du Mouvement international de solidarité, dit dans le film : « Le 14e jour de l’offensive, le 20 juillet 2014, quatre autres militants et moi-même sommes allés dans le quartier de Shuja’iyya, qu’Israël avait bombardé pendant des jours, pour accompagner les équipes de secours dans les décombres pendant les deux heures de cessez-le-feu. Salem Shamaly,un jeune Palestinien dont nous avons appris le nom plus tard, nous a demandé d’aller avec lui chez lui, où il espérait trouver sa famille. Cela semble ridicule maintenant, mais à l’époque, nous pensions que le cessez-le-feu rendrait cela sans danger. »
« Alors que nous traversions une ruelle en vue des positions israéliennes près de la barrière de séparation, un coup de feu venant de leur direction a frappé le sol entre nous. Nous nous sommes dispersés en deux groupes, et abrités derrière des bâtiments de chaque côté. Après un moment, Salem est retourné dans la ruelle, dans l’espoir de conduire son groupe de notre côté, mais il a été frappé par une autre balle. Il est tombé au sol. »
Le film montre Shamaly blessé au sol, à peine capable de bouger et criant de douleur.
« Alors qu’il était sur le dos, il a été touché par deux autres balles », poursuit Catron. « Il a cessé de bouger. Les coups de feu nous ont empêchés de l’atteindre. L’artillerie israélienne a commencé à tirer au-dessus de nos têtes et à frapper les bâtiments derrière nous. Nous avons été forcés de battre en retraite et de l’abandonner. Nous n’avons appris son nom que deux jours plus tard, lorsque sa mère, son père, sa sœur et son cousin l’ont reconnu dans une vidéo que j’avais tweetée. »
« Nous n’avons pu récupérer son corps qu’au bout de sept jours », raconte Um Salem, la mère, dans le film. « Son corps a été exposé au soleil pendant sept jours. »
Waseem Shamaly, le frère de Salem, qui semble avoir environ 8 ans, apparaît à l’écran avec les yeux gonflés par les pleurs. « Il prenait soin de nous, comme notre père », dit le garçon. « Même la nuit, il nous procurait tout ce qu’on voulait. Il nous achetait tout. Ce que nous voulions, il l’achetait. Il n’y avait rien qu’il ne nous aurait pas acheté. Il nous emmenait traîner avec lui. Il nous emmenait avec lui pour tuer un peu notre ennui. »
Waseem s’essuie les yeux.
« Maintenant qu’il n’est plus là », continue-t-il d’une voix faible « Il n’y a plus personne pour nous emmener et nous acheter des friandises. »
« Ce garçon n’a pas été capable de surmonter la perte de son frère », dit le père, Khalil Shamaly. « Il n’a pas supporté la nouvelle, vue la façon dont son frère est mort. Il est en état de choc, incapable du moindre mouvement. Il s’effondre. Quand je le relève il me dit ses dernières volontés. Ses dernières volontés ! Comme s’il nous quittait. Il est si jeune. Mais il nous donne ses dernières volontés. Sans la miséricorde de Dieu, je l’aurais perdu aussi. »
« Les villes détruites et les maisons en ruines peuvent être reconstruites si les ressources sont là », dit M. Blumenthal. « Mais qu’en est-il des survivants ? Comment peuvent-ils guérir des séquelles infligées à leur psychisme ? La jeunesse de Gaza a grandi à travers trois guerres, chacune plus dévastatrice que la précédente. Au moins 90 % des adolescents de Gaza souffrent du syndrome de stress post-traumatique. Avec des services médico-psychologiques au bord de l’implosion, ces séquelles invisibles peuvent ne jamais guérir. »
Le film se tourne vers la ville de Khuza’a, une communauté agricole de 20 000 habitants, qui a été méthodiquement détruite par Israël après que trois soldats israéliens ont été tués au combat avec les brigades d’Al-Qassam, la branche armée du Hamas, au pouvoir à Gaza. Le film montre une vidéo de l’intérieur d’un char israélien alors que des soldats attendent des explosifs pour faire sauter des bâtiments de la ville, y compris la mosquée. Quand les explosions se produisent, les soldats israéliens applaudissent et crient : « Longue vie à l’État d’Israël ! »
« Nous avons été stupéfaits de voir autant de cadavres dans les rues », déclare Ahmed Awwad, bénévole du Croissant-Rouge palestinien, dans le film sur Khuza’a. « Beaucoup se décomposaient. Nous voulions nous en occuper, mais nous ne savions pas comment faire. Une fois, alors que les Israéliens nous avaient laissés entrer avec notre ambulance, nous avons trouvé une dizaine de cadavres de différentes régions, éparpillés. Quand on s’approche d’un corps, bien sûr, il y a l’odeur, et il y a des vers. Tenez-le comme ça, et la chair vous reste dans la main. Soulevez un bras et il se détache. Nous ne savions pas quoi faire. On ne pouvait rien faire. On a dû s’arrêter. Il aurait été plus facile de les enterrer. Mais nous avons pensé que les familles voudraient les corps. Finalement, des bulldozers ont chargé les corps dans des camions. On ne pouvait pas ramasser ces corps tout seuls. La plupart étaient des exécutions, comme cette vieille dame à sa porte d’entrée. Il y avait un jeune homme, un autre homme et un petit garçon. Franchement, le spectacle était vraiment horrible. »
La famille Rjeila, dont Ghadeer, 16 ans, qui souffrait de handicap physique, tente d’échapper aux bombardements. Alors qu’un de ses frères pousse désespérément Ghadeer dans son fauteuil roulant (la scène, comme plusieurs autres dans le film, est reconstruite par animation), les Israéliens ouvrent le feu. Le frère est blessé. Ghadeer est tué.
La caméra se déplace lentement à travers les maisons démolies contenant des restes humains noircis. Les murs et les sols sont couverts de sang.
Ahmed Awwad, un bénévole du Croissant-Rouge palestinien, décrit ce qui s’est passé après que lui et d’autres volontaires ont finalement reçu l’autorisation des forces israéliennes de récupérer des corps à Khuza’a. Ils trouvent un homme attaché à un arbre et touché aux deux jambes. L’un des bénévoles, Mohammed al-Abadla, descend d’un véhicule et s’approche de l’arbre. Lorsqu’il allume sa lampe torche, conformément à ce que les Israéliens lui ont demandé de faire, il se fait tirer en plein cœur et meurt.
« Pendant 51 jours, Israël a bombardé Gaza avec toute la puissance de son artillerie », dit Blumenthal. « Selon les estimations de l’armée israélienne, 23 410 obus d’artillerie et 2,9 millions de balles ont été tirés sur Gaza pendant la guerre. »
Cela fait une balle et demie pour chaque homme, femme et enfant de la bande de Gaza.
Des soldats israéliens d’une unité d’artillerie sont filmés, écrivant des messages, dont « Joyeux anniversaire à moi », sur des obus tirés sur la bande de Gaza. Les soldats rient et mangent des sushis tout en pilonnant les quartiers palestiniens avec des explosifs.
Rafah est une ville de Gaza à la frontière égyptienne. Le film montre clairement que l’Égypte, en bouclant la frontière sud de Gaza, est complice du blocus. Rafah a été l’une des premières villes ciblées par les Israéliens. Lorsque les troupes israéliennes ont pris possession des bâtiments, elles ont également kidnappé des Palestiniens et les ont utilisés comme boucliers humains là-bas et ailleurs, les forçant à se tenir debout devant les fenêtres pendant que les soldats s’abritaient derrière pour faire feu.
« Ils m’ont bandé les yeux, m’ont menotté et m’ont emmené à l’intérieur », dit Mahmoud Abu Said dans le film. « Ils m’ont dit de venir avec eux et de m’ont braqué un M16 dans le dos. Ils étaient environ six. Ils ont posé leur équipement et ont commencé à fouiller. Ils ont commencé à me cogner contre le mur. Ensuite ils ont lancé leurs chiens sur moi alors que j’étais menotté. »
« Ils m’ont mis ici », dit-il, « debout devant une fenêtre, et se sont placés derrière moi. Des soldats israéliens m’ont placé ici pendant qu’ils se tenaient derrière moi en train de tirer. Ils m’ont emmené à cette fenêtre et à cette fenêtre aussi. Puis ils m’ont jeté contre le mur et m’ont poussé au sol. Ils ont mis un matelas ici », dit-il, montrant des trous percés à travers le mur au niveau du sol, « et se sont assis pour tirer à travers ces trous. »
« Vous voyez cette voiture ? » demande Suleiman Zghreibv, pointant un tas de métal tordu abandonné à côté des ruines de sa maison. « Il la conduisait », dit-il à propos de son fils de 22 ans, qui a été exécuté par les Israéliens. « C’est la voiture qu’on utilisait pour gagner notre vie. Ce n’était pas pour un usage personnel. C’était un taxi. Je ne peux pas décrire la souffrance. Qu’est-ce que je peux dire ? Les mots ne peuvent pas exprimer la douleur. Nous avons souffert et résisté pendant si longtemps. Nous avons souffert toute notre vie. Nous avons souffert pendant les 60 dernières années à cause d’Israël. Guerre après guerre après guerre après guerre. Bombardement après bombardement après bombardement après bombardement. Vous construisez une maison. Ils la détruisent. Vous élevez un enfant. Ils le tuent. Quoi qu’ils fassent – les États-Unis, Israël, le monde entier, nous continuerons à résister jusqu’à ce que le dernier d’entre nous meurt. »
Israël a délibérément visé des centrales électriques, des écoles, des hôpitaux, des immeubles d’habitation, des villages entiers. Robert Piper, le coordinateur des Nations Unies pour l’aide humanitaire et les activités de développement, a déclaré en 2017 que Gaza avait « depuis longtemps » dépassé « le seuil d’invivabilité ». Le taux de chômage des jeunes y est de 60 %. Le suicide y est épidémique. Les structures sociales et les mœurs traditionnelles se fissurent ; le divorce est passé de 2 % à 40 % ; on voit de plus en plus de filles et les femmes se prostituer, ce qui était rare à Gaza auparavant. Soixante-dix pour cent des 2 millions de Gazaouis survivent grâce à l’aide humanitaire sous forme de sucre, de riz, de lait et d’huile de cuisine. L’ONU estime que 97 % de l’eau de Gaza est contaminée. La destruction par Israël de la station d’épuration des eaux usées de Gaza signifie que les effluents sont directement rejetés dans la mer, contaminant la plage, l’un des rares lieux de répit pour une population piégée. Les Israéliens n’ont même pas épargné le petit zoo de Gaza, massacrant quelque 45 animaux lors de l’assaut de 2014.
« C’étaient les singes que je préférais », dit Ali Qasem, qui travaillait au zoo. « C’est avec eux qu’on riait le plus. On riait et on jouait avec eux. Ils vous prenaient de la nourriture directement dans la main. Ils étaient les plus réactifs. C’est très triste. Je passais 18 heures par jour ici. J’étais là tout le temps. Je rentrais chez moi pendant cinq ou six heures, puis je revenais. J’ai travaillé ici en tant que bénévole. Quelques bénévoles ont construit cet endroit petit à petit. Nous étions impatients de terminer pour pouvoir inviter gratuitement des visiteurs. Pour moi, c’était comme si des humains avaient été tués. Ça ne se fait pas, même à des animaux. C’est comme s’ils étaient des êtres humains, des gens que nous connaissions. Nous avions l’habitude de leur rapporter à manger depuis la maison. »
Le film montre des Palestiniens, qui ont reçu peu d’aide à la reconstruction malgré les promesses des bailleurs de fonds internationaux, campant au milieu des ruines des maisons, rassemblés autour de petits feux pour la chaleur et la lumière. Moeen Abu Kheysi, 54 ans, fait le tour de la maison détruite qu’il a passé sa vie à construire pour sa famille. Il s’arrête lorsqu’il rencontre son petit-fils de 3 mois, Wadie. Son visage s’illumine de joie.
« Les mois ont passé et les pluies froides de l’hiver ont cédé la place à la chaleur du printemps », dit Blumenthal. « A Shuja’iyya, la famille Abu Kheysi vivait encore dans ce qui restait de leur maison, mais sans le petit nouveau. Né pendant la guerre, le petit Wadie n’a pas survécu aux rigueurs de l’hiver. »
« Il est né pendant la guerre et il est mort pendant la guerre, ou juste après », explique une femme de la famille. « Il vivait dans une pièce à laquelle manquait un mur. Nous avions bouché le trou avec une tôle. On a déménagé, mais on s’est fait virer. On ne pouvait pas payer le loyer. Nous avons dû revenir, reboucher le mur et vivre ici. Puis le bébé est mort de froid. Il faisait très froid. »
« Un jour, il s’est mis tout à coup à faire très froid », dit la mère de Wadie. « Wadie s’est réveillé à 9 h du matin. J’ai commencé à jouer avec lui, je lui ai donné une biberon. Soudain, il s’est mis à trembler de froid. J’ai essayé de le réchauffer, mais ça na pas marché. »
Elle se met à pleurer
« Nous n’avons même pas eu le temps d’aller à l’hôpital », dit-elle. « Il avait cessé de respirer avant même de quitter la maison. Son cœur s’est arrêté de battre instantanément. Son père l’a emmené dans la rue, en courant. Il s’est évanoui quand ils ont crié, “Le bébé est mort !” L’oncle du bébé a pris la relève et l’a porté. Il a cherché partout un taxi, mais n’en a pas trouvé. Nous ne pouvions pas lui dispenser les premiers soins nous-mêmes. Ils ont finalement trouvé une voiture. Ils ont fait tout ce qu’ils ont pu à l’hôpital, mais il ne s’est jamais réveillé. Il était mort. Qu’est-ce que je peux dire ? On pense à lui tout le temps. Je n’arrive pas à l’oublier. C’est comme si j’avais perdu un morceau de mon cœur. Ses sœurs veulent dormir dans son berceau et porter ses vêtements. Celle-ci demande toujours à porter les vêtements de son frère. On ne peut pas l’oublier. »
« Grand-père ! » crie la petite sœur de Wadie. « Maman est encore en train de pleurer. »
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr