"Les devoirs passent avant les droits" : politiques et intellectuels accusent le gouvernement de "fascisme"
France Soir, 1.02.22
Une énième déclaration émanant du gouvernement fait polémique. Au cours d’une interview dans Le Parisien, Gabriel Attal a expliqué qu’Emmanuel Macron, « dans l'après-Covid », projette de « poursuivre la redéfinition de notre contrat social ».
Pour le porte-parole du gouvernement, revoir le fondement politique du pays, son contrat social, passe par la mise en place de « devoirs qui passent avant les droits, du respect de l’autorité aux prestations sociales ». Dans le contexte du passe vaccinal, ces propos ont suscité de vives réactions au sein d’une partie de la classe politique et intellectuelle française.
« Une pensée réactionnaire que l'on n'avait plus entendu formuler ainsi depuis Vichy »
Dans Le Courrier des Stratèges, l’historien et ancien directeur général de l’ESCP Europe, Édouard Husson, a estimé que « le porte-parole du gouvernement se réclame ouvertement d'une pensée réactionnaire que l'on n'avait plus entendu formuler ainsi depuis Vichy ». Pour ce spécialiste de la période du nazisme, le projet politique du macronisme est un « fascisme gris », ce qu’il définit par « un nouvel autoritarisme, qui s’appuie sur le “pouvoir gris”, la partie la plus âgée de la population ». Selon lui, cela fait donc d’Emmanuel Macron « le candidat le plus dangereux pour la démocratie, celui qui met à bas les institutions républicaines dont la raison d’être est la défense des libertés individuelles et collectives. »
Des propos qui font écho à la pensée de l’essayiste Idriss Aberkane, qui a lancé sur Twitter : « C’est le principe d’une dictature fasciste que de détruire la Constitution au cri "les devoirs passent avant les droits" ». Ou encore de ceux du correspondant européen du journal Libération, Jean Quatremer : « La démocratie est fondée sur les droits de l’individu, le totalitarisme sur les droits du collectif fixés par l’État, l’individu ayant avant tout des devoirs. »
La démocratie est fondée sur les droits de l’individu, le totalitarisme sur les droits du collectif fixés par l’Etat, l’individu ayant avant tout des devoirs. Votre ignorance est stupéfiante et criminelle
— Jean Quatremer (@quatremer) January 30, 2022
Les paroles de Gabriel Attal renvoient à de précédents propos de l’actuel chef de l’État. « Être citoyen, ce n'est pas demander toujours des droits supplémentaires, c'est veiller d'abord à tenir ses devoirs à l'égard de la Nation », avait-il dit le 17 août 2021 à l'occasion de la commémoration du débarquement en Provence. Lors de ses vœux pour l'année 2022, le président avait fait l'éloge du « citoyen libre » qui serait « toujours un citoyen responsable pour soi et pour autrui ». « Les devoirs valent avant les droits », avait-il déclaré en évoquant la vaccination.
Cela avait amené l’avocat Maxime Thiébaut à faire une mise au point sur Twitter sur la définition d’un régime de liberté :
Les devoirs ne valent pas avant les droits ; sauf dans les régimes autoritaires. C’est parce que les droits sont intangibles que chaque citoyen consent à les limiter lorsque cela est nécessaire pour garantir l’ordre public. Voici la définition d’un régime de liberté.
— Maxime Thiébaut (@MaximeThiebaut) January 2, 2022