La menace terroriste néonazie s'accroît avec l'emprisonnement de combattants ukrainiens en France
Article originel : Neo-Nazi terror threat grows as Ukraine fighters jailed in France
Par Kit Klarenberg
The Gray Zone, 09.05.23
L'arrestation de deux néonazis français lourdement armés à leur retour d'Ukraine met en lumière un problème imminent pour les États de l'OTAN qui soutiennent la guerre par procuration, et leur conspiration du silence sur la nature de la menace.
Le 24 avril 2023, deux néonazis français ont été condamnés à 15 mois de prison, dont neuf avec sursis, pour possession de munitions de fusil d'assaut. Les deux hommes étaient rentrés à Paris en provenance d'Ukraine deux jours plus tôt et ont été arrêtés à la douane.
Ils étaient tous deux dans le collimateur de la DGSI, l'agence française d'espionnage intérieur, qui détenait des dossiers sur eux pour atteinte à la sûreté de l'État. Selon le média français Mediapart, l'un d'eux était un ancien combattant des Chasseurs Alpins, la force d'élite de l'infanterie de montagne française. Il a été renvoyé de l'armée après que ses sympathies néonazies ont été révélées sur Internet. L'autre est un militant local d'extrême droite bien connu.
Comme dans de nombreux autres pays occidentaux, des centaines de citoyens français se sont rendus à Kiev pour prendre les armes contre la Russie depuis que celle-ci a envahi l'Ukraine en février 2022. Selon la DGSI, au moins 30 des combattants étrangers français sont des fascistes notoires.
Cet exode choquant n'a toutefois pas suscité l'intérêt des médias anglophones, sauf en mars 2022, lorsque le militant d'extrême droite Loïk Le Priol a été expulsé de Hongrie en direction de l'Ukraine pour répondre des accusations de meurtre du joueur de rugby argentin Federico Martín Aramburú à Paris.
Il était inévitable que certains des néonazis français qui ont réussi à se rendre à Kiev aient des liens préexistants avec le Bataillon Azov, le célèbre groupe paramilitaire néonazi ukrainien. En janvier 2022, Paris a interdit le groupe suprématiste blanc des Zouaves. Ses membres avaient violemment attaqué des manifestants antiracistes qui perturbaient un rassemblement en faveur du candidat d'extrême droite à l'élection présidentielle, Éric Zemmour, le mois précédent. Le chef du mouvement, Marc de Cacqueray-Valmenier, s'est rendu en Ukraine en décembre 2019 pour rencontrer des représentants d'Azov et assister à ses camps d'entraînement.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, Ouest Casual, une chaîne Telegram encore existante liée aux Zouaves, a publié un flux constant d'hommages aux soldats ukrainiens, dénonçant à plusieurs reprises les "contingents asiatiques de l'impérialisme soviétique qui déferlent à nouveau sur l'Europe" et les "chiens islamistes de Poutine", en référence aux combattants tchétchènes. Bordeaux Nationaliste, un groupe néo-nazi violent étroitement lié aux Zouaves, a régulièrement organisé des collectes de matériel pour le combat.
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Les deux néonazis récemment incarcérés auraient été "interrogés toute la journée" par la police après leur arrestation sur les raisons pour lesquelles ils transportaient dans le pays du matériel militaire, dont la possession est absolument illégale en vertu de la loi française. La réponse évidente est que les deux hommes avaient l'intention de ramener chez eux la terreur des champs de bataille ukrainiens.
En novembre, Alex Rubinstein a rapporté pour The Grayzone que la police italienne avait arrêté cinq membres du groupe néonazi local, l'Ordre de Hagal, qui entretient des liens opérationnels avec le Bataillon Azov. Ils stockaient des armes, notamment des munitions, des équipements tactiques et un lance-grenades, et planifiaient des attaques terroristes. Un sixième membre, qui combattait alors aux côtés d'Azov en Ukraine, était toujours recherché.
Les néonazis faisaient l'objet d'une surveillance intensive de la part des autorités italiennes depuis 2019. L'un d'entre eux - signalé comme étant "dangereusement proche des groupes nationalistes ukrainiens d'extrême droite" - planifiait une attaque contre un poste de police à Naples, tandis que le combattant d'Azov en fuite avait un centre commercial dans la même ville dans sa ligne de mire.
Dans une conversation interceptée en janvier 2021, le premier s'est vanté de "faire un massacre comme celui de la Nouvelle-Zélande", en référence au tireur de Christchurch qui avait assassiné 51 musulmans deux ans plus tôt. Cet individu avait orné son gilet pare-balles et la couverture de son manifeste, qui mentionnait l'Ukraine, du logo omniprésent du "soleil noir" d'Azov.
Comme l'a révélé une enquête menée en 2020 par le centre de lutte contre le terrorisme de l'académie militaire de West Point, ce manifeste est devenu une monnaie d'échange populaire en ligne parmi les groupes paramilitaires ukrainiens, et a même été traduit en ukrainien et vendu sous forme de livre par un jeune homme de 22 ans vivant à Kiev. Le Centre a noté que l'Ukraine "exerce une attraction particulière sur les suprémacistes blancs, qu'ils soient idéologues, militants ou aventuriers", notamment en raison de l'émergence d'Azov et d'autres éléments fascistes soutenus par l'État.
C'était la première fois depuis la défaite des nazis qu'une "milice nationaliste blanche d'extrême droite", où que ce soit dans le monde, était "célébrée publiquement, s'organisait ouvertement et avait des amis haut placés". Le soutien du gouvernement de Petro Porochenko et des services de sécurité ukrainiens - "malgré des rapports bien documentés sur les violations des droits de l'homme" - a été "électrisant pour les individus et les groupes d'extrême droite en Europe, aux États-Unis et plus loin encore", note l'enquête. Les fascistes ont donc afflué en masse à Kiev pour rejoindre Azov et/ou recevoir une formation.
Les États-Unis et leurs vassaux internationaux ont eu à cœur d'encourager et de faciliter la prolifération du néonazisme en Ukraine. Tout au long de la guerre froide, la CIA et le MI6 ont adopté une politique secrète visant à encourager les éléments ultranationalistes en Ukraine à saper le régime communiste. Dans les années qui ont suivi le coup d'État de Maïdan en 2014, soutenu par les États-Unis, de nombreuses milices d'extrême droite ont reçu une formation militaire de haut niveau de la part de Washington, de Londres et d'Ottawa. Le soutien de l'Occident n'a fait que croître depuis l'invasion de la Russie.
Deux groupes qui ont bénéficié d'une formation pratique approfondie...
Traduction SLT