Si le Rassemblement national (RN) a choisi de demeurer dans l’ambiguïté sur l’Ukraine et l’Europe, il est plus loquace sur l’Algérie. Au-delà du rapport particulier de la France à ce pays, ce dernier est convoqué surtout pour parler de la France et du rapport de celle-ci au monde et à sa mémoire coloniale. Il s’y révèle les approximations d’une perception du monde brouillée par des obsessions identitaires et la permanence des filiations antisémites et xénophobes.
Il n’est pas fortuit que le conseiller le plus en vue des dirigeants du Rassemblement national (RN) sur la diplomatie soit Xavier Driencourt. Celui-ci est même souvent évoqué par les éditorialistes comme un possible ministre des affaires étrangères si ce parti devait accéder au pouvoir. Ancien ambassadeur, très prolixe sur l’Algérie où il a été en poste, il s’est fait connaitre par sa revendication d’une ligne dure vis-à-vis de ce pays, notamment sur la question migratoire. C’est cette position qui a fondé son rapprochement avec le RN. Il est à l’origine de l’idée de révocation de l’accord algéro-français de 1968, devenue une mesure phare du RN.
Cet accord avait été conçu alors pour freiner l’installation des Algériens en mettant fin à la clause de libre circulation contenue dans les accords d’Évian du 18 mars 1962. Depuis, il a été de fait expurgé des avantages concédés aux Algériens et cela au fil de trois avenants négociés en 1985, 1994 et 2001. Surtout, l’obligation de visa instaurée à la fin des années 1980 a de fait aligné les Algériens sur les autres ressortissants du Sud. Il en est resté surtout un avantage accordé aux étudiants légalement installés en France qui leur ouvre la possibilité de s’établir dans une activité non salariée. Par certains aspects, cet accord désavantage même les Algériens puisqu’il leur barre l’accès aux nouveaux dispositifs : passeports talents, cartes pluriannuelles, titre de séjour pour motifs humanitaires, droit au travail et changement de statut des étudiants internationaux par la carte de séjour « recherche d’emploi ou création d’entreprise » ou encore les mécanismes légaux de régularisation1.
La preuve que cet accord n’est pas le facilitateur prétendu de l’immigration des Algériens ni un obstacle au contrôle de celle-ci, c’est que la part des Algériens dans l’immigration en France (12,5 %) est quasiment la même que celle des Marocains (11,9 %) alors que ces derniers ne bénéficient pas d’un tel accord et que leur migration vers la France est plus tardive...
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