Tsahal et la Wehrmacht : mêmes mécanismes ? (Historien israélien)
Par Daniel Schneidermann
Arrêt sur images, 21.08.24
Encore un texte sur Gaza. Tout aussi essentiel, et complémentaire de celui que je signalais dans mon dernier blog. Celui qui parle est cette fois un historien israélien, Omer Bartov, spécialiste de l'Armée du Troisième Reich, vivant aux Etats-Unis, et qui vient de séjourner deux semaines, pour raisons familiales, dans un Israël qu'il n'a pas reconnu. Et au terme duquel il conclut :"Israël se livre à des actes génocidaires".
"reflétant un sentiment bien plus répandu dans le pays", dit-il, avec lesquels il a tenté d'engager le dialogue. Mobilisant ses connaissances d'historien, ses souvenirs, et le récit de cette rencontre, il les amène à se compléter l'une l'autre, en une complémentarité qui me rappelle un autre texte, d'un autre historien / acteur / témoin : le témoignage de Marc Bloch sur la débâcle de 40,
L'Etrange défaite. J'y ai immédiatement pensé.
A propos de l'animalisation de l'ennemi, après avoir énuméré les nombreuses déclarations génocidaires de responsables israéliens, sur le mode "animaux humains"
, il cite cet extrait de lettre d'un sous-officier allemand, sur le front de l'Est en 1941 : "Le
peuple allemand a une grande dette envers notre Führer, car si ces bêtes, qui sont nos ennemis ici, étaient venues en Allemagne, de tels meurtres auraient eu lieu que le monde n’a jamais vu auparavant…"
Dans la psychologie des soldats allemands comme dans celle des Israéliens rencontrés en 2024, il décèle un point commun : le sentiment de trahison : "Les jeunes hommes et femmes avec qui j’ai discuté ce jour-là étaient remplis de colère, parce que, je pense, ils se sentaient trahis par tout le monde autour d’eux. Trahis par les médias, qu’ils percevaient comme trop critiques, par les hauts gradés qu’ils jugeaient trop indulgents envers les Palestiniens, par les politiciens qui n’avaient pas réussi à empêcher le fiasco du 7 octobre, par l’incapacité de Tsahal à obtenir une « victoire totale », par les intellectuels et les gauchistes qui les critiquaient injustement, par le gouvernement américain qui ne livrait pas assez de munitions assez rapidement, et par tous ces politiciens européens hypocrites et ces étudiants antisémites qui protestaient contre leurs actions à Gaza. Ils semblaient effrayés, peu sûrs d’eux et confus, et certains souffraient probablement aussi de syndrome de stress post-traumatique"
... Lire la suite