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La revanche de Kadhafi (Raialyoum)

par Abdel Bari Atwan 31 Mars 2018, 08:47 Libyagate Sarkozy Kadhafi Revanche Malédiction Libye Destruction OTAN Françafrique France Impérialisme néocolonialisme Financements libyens Articles de Sam La Touch

La revanche de Kadhafi
Article originel : Qadhafi’s Revenge
Par Abdel Bari Atwan
Raialyoum


Traduction SLT

(c) AP

(c) AP

La malédiction du colonel revient hanter l'homme qui a détruit son pays et l'a fait tuer.

Des millions de Libyens, et bien d'autres Arabes et Musulmans, auront été ravis d'apprendre que l'ancien président français Nicolas Sarkozy a été interrogé, puis libéré sous caution, parce qu'il aurait reçu plus de 50 millions d'euros de l'ancien dirigeant libyen Mouammar al-Kadhafi pour financer sa campagne électorale réussie de 2007. Personne ne l'a été plus que les victimes directes de la campagne de bombardement de l'OTAN de 2011 qui a détruit la Libye, l'a transformée en un État en faillite et a entraîné la mort de dizaines de milliers de ses habitants et la fuite de millions d'autres pour vivre dans la misère dans les pays voisins. Cela signifie que ceux qui restent dans leur pays d'origine sont mieux lotis : mais dans la plupart des cas, leurs conditions de vie sont encore pires.

Les enquêteurs français de Sarkozy ont confirmé qu'ils disposent de preuves sérieuses d'activités criminelles de sa part sur plusieurs chefs d'accusation, y compris la corruption, le blanchiment d'argent et la violation des lois françaises sur le financement des campagnes électorales.
Il est ironique que Kadhafi ait aidé Sarkozy à entrer dans le palais de l'Elysée et qu'il soit maintenant la cause de son annulation et de sa détention, après des années d'enquêtes remplies de scandales.

Sarkozy pensait qu'en déchaînant les frappes aériennes de l'OTAN sur la Libye et en faisant capturer et tuer sommairement Kadhafi, de la manière laide et sanglante dont cela a été réalisé, qu'il pourrait enterrer les secrets du dirigeant libyen avec son corps dans un endroit inconnu dans le désert libyen. Il ne savait pas que la " malédiction du colonel " reviendrait le hanter, détruire son avenir politique et personnel et le consigner dans une place bien méritée dans la poubelle de l'histoire.

Les millions de Libyens qui sont maintenant nostalgiques de Kadhafi - après avoir vu ce que ses successeurs ont fait subir au pays - doivent remercier l'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine.  Il a révélé qu'il avait livré trois mallettes remplies de billets de 200 et 500 euros au chef d'état-major de Sarkozy lorsqu'il était ministre de l'Intérieur et l'avait rencontré en personne au ministère, et qu'il soutenait cela avec un affidavit de l'ancien chef du renseignement étranger libyen Mousa Kousa que le régime de Kadhafi avait fourni 50 millions d'euros en espèces à la campagne de Sarkozy.

En mars 2001, après que le rôle central de Sarkozy durant l'intervention de l'OTAN est devenu apparent, Kadhafi lui-même en a parlé dans un discours : "J'ai aidé Sarkozy à atteindre le pouvoir. Je lui ai donné de l'argent pour qu'il puisse devenir président.... Il est venu ici et a visité ma tente quand il était ministre de l'Intérieur et a demandé de l'aide". Son fils Saif-al-Islam, pour sa part, a déclaré dans une interview télévisée que "le clown" Sarkozy devrait "rendre l'argent qu'il a pris à la Libye pour financer sa campagne électorale".
Sarkozy a de bonnes chances d'être condamné. Contrairement à Kadhafi, la plupart des témoins sont encore en vie et peuvent être convoqués pour témoigner ou recevoir la visite de procureurs pour faire des déclarations de témoins. Il s'agit notamment de Saif al-Islam et de l'ancien chef de la sécurité Abdallah as-Sanousi (en Libye), de Mousa Kousa (au Qatar) et de l'ancien chef du bureau de Kadhafi, Bashir Saleh (actuellement en Afrique du Sud).

Il est ironique que Sarkozy ait prétendu aux enquêteurs - selon le quotidien Le Figaro - qu'il a été victime d'une campagne que Kadhafi a commencé contre lui et qui a été poursuivie par ses hommes de main, ce qui lui a coûté les élections de 2012, et qu'il a nié toutes les accusations.
Sarkozy a peut-être perdu sa présidence lors des élections de 2012, mais grâce à ses intrigues, le peuple libyen a perdu son pays, sa sécurité et sa vie normale, qui ont été transformés en enfer pour des millions de personnes à l'intérieur et à l'extérieur du pays.

Ces Libyens ont le droit de savourer le retour de boomerang sur Sarkozy et veulent le voir derrière les barreaux, à tout le moins. Il porte la responsabilité première de la mort et de la destruction de la Libye, que personne n'aurait pu imaginer et qui - plus grave encore - se poursuit encore aujourd'hui et peut-être pour les années à venir.
C'est la malédiction du peuple libyen qui a été victime de la plus grande fraude de son histoire lorsqu'il a cru que l'OTAN et ses avions de guerre lui apporteraient liberté et justice sociale et établiraient un modèle de sécurité, de stabilité et de prospérité pour un avenir meilleur. Cette malédiction a frappé Sarkozy, mais elle poursuivra aussi ceux qui ont été complices de cette conspiration désastreuse, y compris des personnalités libyennes et des dirigeants arabes qui savent bien qui ils sont.
 
La vengeance ne ramènera pas Kadhafi à la vie, ni les 35 000 victimes des bombardements de l'OTAN et des milices qu'elle a portées au pouvoir, qui ont semé la mort et la destruction dans tout le pays et l'ont pillé de plus de 360 milliards de dollars que Kadhafi a laissé derrière lui en tant qu'actifs de l'État. Mais elle fournit une sorte de justice divine, ce qui est le moins que l'on puisse espérer.

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