Les Macron's Watch se suivent et se ressemblent, nous retrouvons à chaque nouveau numéro certaines constances, caractéristiques du personnage déjà signalés antérieurement. Elles ont à voir avec son pragmatisme "idéaliste" virant au cynisme, son libéralisme, son asservissement au complexe-militaro-industriel français et à son atlantisme. Ces ingrédients caractérisent les modalités de gouvernance du nouveau chef de guerre en place comme ses prédécesseurs et font craindre de nouvelles actions impérialistes et françafricaines nous confirmant donc dans la nécessité d'un Macron's Watch mais d'aucuns diront d'un France's Watch.
Macron's Watch
- Psittacisme atlantiste sur la Syrie
- Discours aléatoires et virages à 180°
- Double discours sur le terrorisme ?
- Complicité de crimes de guerre au Yémen
Psittacisme atlantiste sur la Syrie
Souvenez vous dans le MW n°4, nous évoquions le psittacisme atlantiste macronien au sujet du Vénézuela, voici que le nouveau chef de guerre des Français remet cela pour la Syrie. Le 13 février 2018, Macron a déclaré à la suite du secrétaire à la Défense étatsunien, Jim Mattis, qu'il était prêt à lancer des frappes aériennes contre le régime de Bachar Al Assad si les preuves d'attaques au gaz chimique étaient avérés en Syrie de la part du régime, selon l'AFP, :
"Si la France "a des preuves avérées que des armes chimiques proscrites sont utilisées contre les civils" en Syrie par le régime, "nous frapperons", a réaffirmé mardi le président Emmanuel Macron devant l'Association de la presse présidentielle." (AFP Syrie : la France "frappera" en cas de "preuves avérées" d'armes chimiques, affirme Macron).
Macron reprenant ainsi les déclarations du secrétaire à la Défense Jim Mattis qui a exprimé le 7 février son assurance que le gouvernement syrien utilisait couramment le chlore comme arme contre les dernières poches d'opposition du pays et s'était dit prêt à intervenir militairement. Puis Mattis a été forcé d'admettre ce qui suit, selon Reuters :
"Mattis, s'entretenant avec des journalistes, a déclaré que le gouvernement syrien avait utilisé à plusieurs reprises du chlore comme arme. Il a souligné que les États-Unis ne disposaient pas de preuves de l'utilisation du gaz sarin."Nous sommes encore plus préoccupés par la possibilité de l'utilisation du sarin, (mais) je n'ai pas les preuves ", a déclaré Mattis. Ce que je dis, c'est que d'autres groupes sur le terrain - ONG, combattants sur le terrain - ont déclaré que le sarin a été utilisé, alors nous cherchons des preuves".
Une semaine plus tard, Macron répète donc le même discours en se disant prêt à faire intervenir l'armée française si la "ligne rouge" était franchie par le gouvernement syrien (en ce qui concerne l'utilisation d'armes chimiques).
Mais, selon Zero Hedge, quelques heures plus tard, il aurait envoyé son ministre des Affaires étrangères Le Drian réaliser un petit correctif de ses propres déclarations calquées sur les déclarations atlantistes initiales de Mattis :
"En ce qui concerne les armes chimiques, j'ai tracé une ligne rouge et je la réaffirme", a déclaré M. Macron aux journalistes mardi à Paris. "Aujourd'hui, nos agences, nos forces armées n'ont pas établi que les armes chimiques, telles qu'elles sont énoncées dans les traités, ont été utilisées contre la population civile". Quelques heures plus tard, Macron décida de ne pas confirmer "cette ligne rouge", après avoir envoyé un membre de son cabinet faire marche arrière.
Selon Reuters, le ministre français des Affaires étrangères a cherché à clarifier la position de son gouvernement sur l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, affirmant que Paris ne frapperait que si les attaques étaient meurtrières et menées par les forces gouvernementales. Jusqu'à présent, la France a admis que rien ne prouve que le régime d'Assad ait utilisé des armes chimiques. (Zero Hedge).
Discours aléatoires et virages à 180°
Macron semble coutumier des virages à 180 degrés dans ses déclarations. Souvenez-vous de son voyage en Côte d'Ivoire, après son voyage désastreux au Burkina Faso (MW n°12, NWn°11), où il s'était dit prêt à entrer en guerre en Libye pour lutter contre les trafiquants d'esclaves libyens (alors que le gouvernement français traite avec les autorités libyennes parfaitement au faite du problème et l'avalisant souvent). Voir MW n°11
Il avait ainsi annoncé à RFI "une initiative visant à lancer des actions concrètes militaires et policières sur le terrain pour remonter ses filières (esclavagistes)" (voir la vidéo ci-dessous). Rajoutant "La Libye a réaffirmé son accord pour autoriser l’accès au sol libyen (aux militaires et policiers français, ndlr) afin d’évacuer les camps où ces scènes de barbarie ont été identifiées ». Macron cherche-t-il à finir le sale boulot débuté par Sarkozy-Hollande en Libye, cherche-t-il lui aussi sa guerre humanitaire ?
"Mais, dès le lendemain matin, alors que les travaux du sommet reprenaient, l’idée d’une intervention militaire et policière apparaissait précipitée, des représentants de l’UE et de l’UA affirmant à RFI qu’elle était même écartée. Et dans l’après-midi, après être arrivé à Accra au Ghana, dernière étape de sa tournée africaine, le président français faisait machine arrière, déclarant qu’« à ce stade », la France ne prévoyait pas d’envoyer de policiers ou de militaires français en Libye. « Sur le sol libyen, il appartient aujourd’hui au gouvernement libyen d’en décider en lien avec l’Union africaine », a-t-il admis". (Mediapart Migrants: Macron prône une action militaire en Libye, puis recule).
Double discours sur le terrorisme en Syrie ?
Des positions bancales pourraient on dire ? On ne croît pas si bien dire lorsque l'on découvre ses doubles discours fréquents (cf MW n°6, MW n°13, MW n°16). Ainsi lors que Macron a menacé Assad d'intervenir militairement, il a déclamé que "la priorité c'est la lutte contre les terroristes, les jihadistes". (AFP Syrie : la France "frappera" en cas de "preuves avérées" d'armes chimiques, affirme Macron). Pourtant le même jour, son conseiller recevait les Casques blancs syriens mis en cause pour leur soutien aux djihadistes d'Al Qaida,
Selon l'AFP, un conseiller du nouveau chef de guerre en poste a reçu les Casques blancs en mal de financement : "Nous sommes en train d'établir notre budget pour 2018 et il est en baisse d'environ 6 millions de dollars (5 million euros)", a précisé M. Almawwas, à l'issue d'une rencontre à Paris avec un conseiller du président Emmanuel Macron.
Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne étaient les principaux contributeurs en 2017, a-t-il ajouté, sans vouloir préciser quels partenaires avaient réduit leur soutien financier." (AFP Les "Casques blancs" syriens en mal de financement). Selon l'AFP, les Casques blancs sont des "secouristes bénévoles qui portent assistance aux civils victimes du conflit syrien, manquent de financements pour poursuivre leur action, a déclaré mardi à la presse leur vice-président Abdulrahman Almawwas". Selon 21st Century Wire et Vanessa Bayley, journaliste freelance sur le terrain : "les Casques Blancs à Alep - sont partis avec le Front Al Nosra dans les bus verts organisés par le gouvernement syrien pour évacuer tous les terroristes armés et leurs familles en décembre 2016." ( CASQUES BLANCS: Channel 4, BBC, The Guardian - Architectes de la guerre "humanitaire")
On y retrouve là le double discours macronien si déroutant pour ceux qui suivent ses déclarations bien souvent occultées par les médias. Cf MW n°5 :
"Macron a déclaré au Point (à la page 48) : "J'ai établi des relations d'une extrême franchise avec l'ensemble des puissances du Golfe", explique-t-il. Avant d'ajouter: "Dans mon dialogue avec les Emiriens, les Saoudiens et les Qatariens, j'aborde la question du financement du terrorisme. Le Qatar et l'Arabie saoudite ont financé des groupements qui n'étaient pas les mêmes, mais qui ont de fait contribué au terrorisme". (Source : L'Express Pour Macron, le Qatar et l'Arabie Saoudite ont financé le terrorisme). En faisant cette déclaration, Macron reconnaît implicitement que la France a soutenu des pays qui ont financé le terrorisme. Un soutien français qui a été politique, diplomatique et militaire.
On ne pourra qu'évoquer les ventes d'armes massives à l'Arabie saoudite et au Qatar effectuées par la France ainsi que son soutien politique de tous les instants apporté à ces deux pays. Cela pose in fine la question de la responsabilité de l'Etat français sous le gouvernement Hollande dont Macron était ministre de l'économie mais aussi sous Macron, le Jupitérien."
Complicité de crimes de guerre au Yémen
Dans le MW n°9, nous rappelions les ventes d'armes récentes du gouvernement Macron aux pays du Golfe et notamment aux EAU.
- Macron a vendu deux navires militaires aux Emirats Arabes Unis. (Reuters)
La question est d'autant plus embarrassante que les EAU sont accusées au côté de l'Arabie saoudite de crimes de guerre au Yémen selon Amnesty international.
Lire : - AP In Yemen’s secret prisons, UAE tortures and US interrogates
Or le gouvernement Macron contrairement au gouvernement allemand ou bien norvégien n'entend pas arrêter de vendre des armes aux pays du Golfe selon Reuters :
"La France n' a montré aucun signe concret de réduction ou de suspension des ventes d'armes à une coalition dirigée par l'Arabie saoudite malgré les avertissements selon lesquels certaines de ses armes pourraient être utilisées dans la guerre au Yémen, selon des sources informées de la question vendredi. Le royaume saoudien est à la tête d'une coalition formée en 2015 pour combattre le groupe Houthi aligné sur l'Iran qui contrôle la majeure partie du nord du Yémen et la capitale Sanaa, dans une guerre qui a tué plus de 10 000 personnes et déplacé plus de 3 millions d'autres. L'administration française dirigée par le président Emmanuel Macron a été critiquée en particulier par les groupes de défense des droits de l'homme pour son soutien aux actions du royaume et pour avoir permis que les armes qu'il a vendues à Riyad soient utilisées dans le cadre de ses opérations au Yémen."
Cela pose la question de la complicité du gouvernement Macron envers les crimes de guerre voire les crimes contre l'humanité commis par leurs alliés du Golfe au Yémen (MW n°14).
Une récente pétition vient de voir le jour et prend de l'ampleur. Elle demande instamment au gouvernement Macron de cesser ses ventes d'armes aux pays impliqués dans les massacres au Yémen mais visiblement cela n'entre pas dans les conceptions de celui-ci qui semble beaucoup plus attaché aux intérêts du complexe militaro-industriel français qu'à ceux des droits de l'homme contrairement à des pays comme la Norvège ou l'Allemagne.
Comme l'a exprimé la ministre de la défense française, selon Defense News : " l'industrie européenne de la défense a besoin d'exportation pour survivre" : " Parly répondait à une question au sujet de la vente d'armes et des règlements qui s' y rattachent. Ces derniers mois, certains pays européens ont fait part de leurs préoccupations au sujet des ventes d'armes aux pays impliqués dans le conflit au Yémen. Mais Parly a défendu la politique d'exportation française, affirmant qu'elle suit des règles strictes - et qu'elle est vitale pour l'industrie."
CQFD,
Lire également :
- Pétition. Que Macron mette un terme aux exportations d'armes au Yémen (Sum Of Us)
- Yémen. Hypocrisie et duplicité macronienne. La France dit être "vigilante" sur les ventes d'armes à l'Arabie saoudite mais continuera à lui en transférer selon Reuters
A lire aussi :
- Les EAU utilisent des chars français dans leur invasion du Yemen
- La France protégerait l'Arabie Saoudite d'une enquête internationale des Nations Unies sur le Yémen
- Bastamag, 6 février 2018 Mirages 2000, chars Leclerc, canons Caesar : la France fournisseuse officielle du carnage yéménite
- Comment la France participe à la guerre contre le Yémen. Ventes d’armes et crimes de guerre (Orient XXI)
- Yémen. Hypocrisie et duplicité macronienne. La France dit être "vigilante" sur les ventes d'armes à l'Arabie saoudite mais continuera à lui en transférer selon Reuters
- BastaMag. 6 février 2018. Yémen : un enfant meurt toutes les 10 minutes alors qu’on pourrait l’éviter
- UNICEF. 30 novembre 2017. Armement : la France, supermarché de l'Arabie saoudite
- Mondafrique 7.05.2015 Les Forces spéciales françaises interviennent au Yémen
- SLT 25.07.16 Quand Amnesty international demande à François Hollande de suspendre immédiatement les transferts d’armes et les soutiens militaires à l’Arabie saoudite responsable de crimes de guerre au Yémen
- Reuters 22.08.2016 Une ONG dénonce les ventes d'armes illégales de la France, de la Grande-Bretagne et des USA à l'Arabie saoudite
- Reuters 11.11.2017 Macron a vendu deux navires militaires aux Emirats Arabes Unis
- « La France compte beaucoup sur les Émirats et l’Arabie saoudite pour le financement du G5 Sahel » (TSA)