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Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

par HIcham Hamza 8 Février 2015, 18:06 France Charlie Hebdo Attentat Vidéo falsifiée

INFO PANAMZA. Découvrez comment -et pourquoi- les premières images de l'attentat de Charlie Hebdo ont été délibérément altérées.

Il était précisément midi, ce mercredi 7 janvier 2015.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Vingt minutes seulement après le départ des hommes responsables de l'attaque de Charlie Hebdo, la chaîne I-Télé diffusait déjà les premières images -confuses et saccadées- de l'évènement.

À 11h47, le vidéaste à l'origine de ces images -capturées depuis le toit de l'immeuble- avait posté ce tweet :

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Journaliste de l'agence Premières Lignes, Martin Boudot apparaît curieusement (vers 0'33) dans la vidéo qu'il aurait pourtant lui-même filmé -aux alentours de 11h40.

Sollicité ensuite par CNN et BFM TV au sujet de son scoop, Boudot a tenu une étrange déclaration sur l'antenne de RMC. Lors de son entretien (réalisé -en direct- le lendemain matin) avec Jean-Jacques Bourdin, le jeune homme, issu de la promotion 2008 de l'École publique de journalisme de Tours, a ainsi affirmé incidemment (à 11'50) qu'"on connaissait bien le responsable de la maintenance" qui fut abattu -en premier- par les terroristes.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Problème : l'homme en question -dénommé Frédéric Boisseau et salarié de Sodexo- effectuait là son premier jour dans l'immeuble dans lequel se côtoyaient, depuis l'été dernier, les équipes de Charlie Hebdo et de Premières Lignes.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Détail troublant : le patron de Boudot a exprimé la même contre-vérité, à deux reprises. Interviewé en fin de soirée sur CNN puis le lendemain par une chaîne canadienne, Paul Moreira -fondateur de l'agence dirigée aujourd'hui par son collègue Luc Hermann (tous deux dans l'image ci-dessus)- a également prétendu bien connaître -et même "apprécier"- Frédéric Boisseau dont il dit l'avoir croisé "chaque matin".

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Boudot et Moreira auraient-ils pu confondre Boisseau avec un autre technicien? Peu probable : le nom et le visage de la première victime des terroristes étaient connus dès le soir de l'attentat, soit plusieurs heures avant leurs déclarations respectives et factuellement impossibles.

Une vidéo retouchée

Quoi qu'il en soit de la motivation des propos affabulatoires tenus par le tandem Boudot-Moreira, une chose est certaine : tout le monde a vu, partiellement ou intégralement, les images du jeune homme, reprises et diffusées par l'ensemble des chaînes de télévision -dès le mercredi 7 janvier, à midi.

Voici un extrait plus long, monté par la rédaction de France 24.

La plate-forme Dailymotion du groupe France Télévisions a également mis en ligne la vidéo amateur de Martin Boudot.

Même réactivité au sein du groupe TF1: à 13h24, LCI diffusait ces images, également commentées, dans le même temps, par Jean-Pierre Pernaut. Le JT de 20h n'a pas manqué de les diffuser, à l'instar de son concurrent France 2. Dans le journal télévisé de David Pujadas, le journaliste Franck Génauzeau, en charge du sujet, a prononcé ainsi (à 10'15) ce commentaire au sujet de la séquence affichée ci-dessous : "Il y a deux hommes sur cette image".

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

C'est faux.

En réalité, il y en a quatre : deux terroristes (au milieu de la rue) et, visibles juste au-dessus, deux inconnus -debouts sur une terrasse.

La palme de l'entourloupe revient ici à BFM TV : lors de son entretien avec Martin Boudot, la chaîne (dont la vedette Ruth Elkrief fut la première à interviewer Jeannette Bougrab dans son nouveau rôle -problématique- de veuve éplorée de Charb) n'a pas hésité à diffuser des images cerclées des terroristes. Conséquence : les deux inconnus, déjà réduits à deux points noirs vaguement mobiles, ne risquaient plus ainsi de susciter l'éventuelle attention du téléspectateur.

La présence de ces hommes (également visibles, plus nettement, à gauche de l'image ci-dessous) avait déjà été soulignée par Panamza dans une enquête publiée le 22 janvier.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

L'un d'entre eux serait un ouvrier polonais responsable d'une autre vidéo "amateur", obtenue par l'agence Reuters et diffusée le 13 janvier par la plupart des médias télévisés.

Aujourd'hui, il est possible d'affirmer que l'activité et l'identité de ce vidéaste -présent lors de ce moment crucial- ont été délibérément occultées par la presse traditionnelle.

Le samedi 31 janvier, un média américain, dénommé Vice News, a mis en ligne une interview du caricaturiste Luz. Ce membre de l'équipe rescapée de Charlie Hebdo y donnait son sentiment sur les conséquences de l'attentat pour l'avenir du journal.

À 2'42, une séquence visuelle de l'entretien saute aux yeux : on y découvre la qualité inédite d'un extrait de la vidéo de Martin Boudot.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Le contraste est saisissant : depuis le 7 janvier, les images filmées par Boudot et diffusées par l'ensemble des chaînes (y compris étrangères, comme CNN et Sky News) semblaient -au regard de leur aspect flou- avoir été capturées avec un ancien téléphone portable.

En réalité, il n'en était rien : le document obtenu par la correspondante parisienne de Vice News révèle, pour la première fois, un format visuel digne des smartphones modernes.

D'où cette question : pourquoi les chaînes de télévision ont-elle diffusé une version dégradée du document -pourtant historique- de Boudot?

Plus précisément : hormis la qualité esthétique, quelle différence fondamentale y-a-t-il entre la version bas-de-gamme, diffusée par tous les grands médias télévisés depuis le 7 janvier, et la version haut-de-gamme, uniquement relayée par un web-magazine US relativement confidentiel en France?

Réponse : la visibilité d'une anomalie. En l'occurrence : l'image intriguante de cet homme debout dont on apprendra, une semaine plus tard, qu'il s'agissait d'un ouvrier polonais en train de filmer -en toute décontraction- deux terroristes tirant sur des policiers, juste en dessous de lui.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Dans les images diffusées par TF1 et ses homologues, ce vidéaste était un point noir vaguement mobile. Dans la vidéo de Vice News, il apparaît davantage grâce à la qualité de cette version du film.

Pourquoi avoir caché l'existence de cet individu? Après tout, il s'agissait là d'un témoin direct de la fuite des terroristes. Son propre récit, accompagné des images qu'il a lui-même capturées et qui seront finalement relayées (six jours plus tard) par Reuters, aurait suscité, en temps normal, le vif intérêt de la corporation journalistique hexagonale.

Étrangement, tel ne fut pas le cas.

Reste à savoir qui est à l'origine de cette altération volontaire de la vidéo : le journaliste Martin Boudot, son agence de presse (Premières Lignes), les chaînes récipiendaires du document ou un mystérieux intermédiaire ? Un fait est acquis : s'il n'existe évidemment pas de "main invisible" capable de commander secrètement tous les organes de la presse écrite et audiovisuelle, une influence contraignante et passée sous silence s'exerce néanmoins dans la plupart des redactions importantes. Elle provient de la DGSE, bastion du contre-espionnage français.

D'après des journalistes du Canard enchaîné et du Point à l'origine d'une brillante enquête intitulée L'espion du Président (parue en janvier 2012), des agents secrets sont bel et bien installés -sous couverture- dans les médias de masse afin de pouvoir orienter -en amont- la réalisation de tel reportage sensible ou de censurer -en aval- la diffusion de telle information jugée compromettante pour la sécurité nationale.

La DGSE est-elle alors responsable du brouillage de la vidéo de Boudot? Et, si oui, pourquoi?

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Coïncidence : son directeur actuel, dénommé Bernard Bajolet, a perdu son ancien garde du corps dans l'attentat de Charlie Hebdo. Franck Brinsolaro, chargé de la protection de Charb, avait également assuré celle de Bajolet lorsque celui-ci était ambassadeur de France en Afghanistan. Détail à souligner : Bajolet, dont le mandat expire l'an prochain, est actuellement en conflit avec ses adjoints. Parmi ces derniers, un personnalité proche du Conseil représentatif des institutions juives de France : Christophe Bigot, ex-ambassadeur de France en Israël, admirateur du purificateur ethnique David Ben Gourion et nouveau directeur de la stratégie au sein de la DGSE.

À la recherche de Janek

Quant à l'homme quasi-flouté dans la vidéo de Boudot, il s'est évaporé dans la nature après avoir remis ses propres images à Reuters.

Sollicités par Panamza, ses employeurs ont éludé la question de l'identité précise de cet individu censé être un ouvrier polonais, présent ce jour-là sur un chantier de travail – en l'occurrence, le toit d'un petit immeuble situé juste en face du 10, rue Nicolas Appert.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)
Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Le premier interrogé à ce sujet fut David Dahan, patron de la compagnie initialement en charge des travaux. Juste après avoir entamé notre échange en ayant mentionné le prénom -"Janek"- de cet ouvrier, la communication téléphonique s'est brutalement interrompue. Rappel effectué, Dahan me fit simplement savoir -sans davantage d'explication- ne plus être impliqué dans ce chantier et me proposa de me mettre en relation avec "monsieur Geoffroy", propriétaire du bâtiment. Aussitôt contacté, ce dernier s'avéra, à l'inverse, particulièrement volubile : son discours, rôdé au mot près, consista sommairement à m'exprimer son indignation à propos de Janek, "renvoyé manu militari" du chantier pour avoir vendu une vidéo capturée depuis le chantier sur lequel il était censé travailler. Les deux hommes ne seraient plus en contact.

J'ai voulu en savoir plus sur l'individu qui donna à Janek l'accès au toit de son bâtiment. Contrairement à ce que laisserait penser la formule employée par Dahan, son nom de famille n'est pas "Geoffroy". Il s'agit de son prénom.

En consultant et en recoupant les archives en ligne de la Ville de Paris, j'ai ainsi découvert que l'homme en question -qui n'a pas exactement le profil-type du propriétaire parisien lambda- se nomme Sciard. Geoffroy Sciard.

Co-fondateur d'un hôtel chic et gay-friendly du IIIème arrondissement de Paris, ce pimpant quadragénaire, autrefois "responsable de développement d'une association humanitaire" et gérant d'une agence immobilière située près des locaux de Charlie Hebdo, est le fils d'Alain Sciard, ancien capitaine de vaisseau (notamment le sous-marin L'Africaine) devenu co-dirigeant, de 1967 aux années 80, du CNEXO (un établissement public dévolu à l'étude stratégique des mers). Aux côtés de Claude Riffaud, ex-responsable du Service Action de la SDECE (ancêtre de la DGSE), il était notamment affecté à la question de l'armement maritime. Particularité du retraité-bricoleur et ex-militaire Alain Sciard, restée inexpliquée à ce jour : durant les années 1983-1986, il avait été mis sur écoute par l'Élysée.

Son fils, Geoffroy, se distingue aujourd'hui sur un autre plan : celui de ses liens singuliers avec le puissant clan Dassault.

En décembre 2013, Geoffroy Sciard a ainsi vendu un éminent domaine viticole dont il était co-propriétaire avec son frère Thibaut : le Château Faurie de Souchard. L'heureux acquéreur : le viticulteur d'à côté, dénommé Laurent Dassault.

Depuis 1955, les familles Sciard et Dassault possèdent, exactement l'une face à l'autre, des vastes terrains viticoles à Saint-Émilion. Geoffroy Sciard a géré le domaine familial de 2006 à janvier 2014 avant de le céder à Laurent Dassault, lui-même à la tête du Château Dassault depuis 1994.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Quatre mois après la transaction opérée entre les frères Sciard et Laurent Dassault, cadeau-bonus : l'entrée du groupe Dassault (à hauteur de 15%) dans le capital de la société de gestion fondée et co-dirigée par Thibaut Sciard. Proximité renforcée : le patron de la Financière Dassault, dénommé Olivier Costa de Beauregard et désormais co-actionnaire de Delta-AM, est également celui qui a pris les rênes -au nom de Laurent Dassault- du domaine viticole qui avait appartenu aux Sciard.

La spécificité de Laurent Dassault, fils du sénateur UMP Serge Dassault et dirigeant d'Artcurial (première maison française de vente aux enchères) mais également vice-président d'un groupe familial richissime (sixième fortune de France) et partenaire de la DGSE?

Sa connexion étroite avec le complexe militaro-industriel israélien.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Proche de plusieurs personnages influents de la mouvance sioniste hexagonale (notamment David, Benjamin et Éric de Rothschild ainsi que Patrick Drahi, patron de la chaîne israélienne i24news) et longtemps soutien financier de Nicolas Sarkozy, Laurent Dassault cultive, outre des liens familiaux en Israël, des relations intimes avec de redoutables affairistes locaux (parmi lesquels Stef Wertheimer) et de nombreuses figures de la classe dirigeante de Tel Aviv, notamment à la droite de la droite.

L'homme est ainsi administrateur d'un fonds d'investissement dirigé par Edouard Cukierman (par ailleurs porte-parole de l'armée israélienne), aux côtés -entre autres- de Roger Cukierman (président du Crif) et de Yair Shamir. Membre d'un parti israélien ultra-nationaliste, ce dernier, fils de l'ancien Premier ministre et agent du Mossad Yitzhak Shamir, a récemment démissionné du gouvernement Netanyahou en raison d'un scandale de corruption impliquant des responsables de son groupe. La revue Intelligence Online présente cet ex-militaire haut-gradé comme le "lobbyiste israélien de Dassault en Israël". Détail cocasse: son parti d'extrême droite, présidé par le ministre des Affaires étrangères Avigdor Liberman, s'est récemment distingué en faisant la promotion de Charlie Hebdo dans les rues de Tel Aviv.

En novembre, Laurent Dassault avait co-organisé, en compagnie de Gilles-William Goldnadel et Claude Goasguen, une cérémonie en hommage au général Pierre de Bénouville, un homme célébré par la nébuleuse sioniste pour avoir transgressé l'embargo -décrété en 1967 par de Gaulle- de toute vente d'armes à destination d'Israël.

Nulle surprise à cela : en 2008, le quotidien israélien Haaretz avait consacré un portrait au promoteur zélé de Bénouville. D'après la journaliste Ora Coren, Laurent Dassault "se voit lui-même dans la continuité" de son aïeul, Marcel Dassault, qui, "lors de la naissance de l'Etat, arma Israël avec ses premiers avions".

Résumons : à l'origine de la vidéo -étrangement filmée sans crainte d'être atteint par une balle- dans laquelle l'un des assaillants de Charlie Hebdo (bientôt partis en direction d'un local parisien utilisé par l'armée israélienne) déclame -l'index gauche en direction du ciel- avoir "vengé le Prophète", un mystérieux Polonais anonyme, flouté par les médias télévisés et évaporé aujourd'hui dans la nature, était employé par une connaissance commerciale et familiale -de longue date- de Laurent Dassault, multimillionnaire ultra-sioniste connecté à la branche militaire et radicale du régime de Tel Aviv. Et tandis que la chaîne israélienne i24news fut la première au monde à "révéler" la double nationalité franco-algérienne des auteurs désignés de l'attentat, le Premier ministre Benyamin Netanyahou n'a pas tardé à exploiter politiquement un évènement "terroriste et islamiste" dont il avait lui-même annoncé, le 7 août dernier, les contours et l'imminence.

Concours de circonstances ou pièces peu à peu rassemblées d'un puzzle complexe ?

Dans tous les cas, l'histoire de Janek évoque irrésistiblement celle d'un autre ouvrier immigré : le Tchèque Pavel Hlava.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

En compagnie de son employeur Mike Cohen (tous deux dans l'image ci-dessus), l'homme avait affirmé avoir filmé accidentellement (comme les frères Naudet, aujourd'hui documentaristes officieux pour le compte de la Maison Blanche) les deux crashs des avions dans le World Trade Center, ce 11 septembre 2001. À l'instar de Geoffroy Sciard, Cohen aurait reproché ultérieurement à son ouvrier -également évaporé depuis dans la nature- d'avoir vendu ses images aux médias.

À ce jour, une seule chose est certaine : la terrasse au rebords blancs depuis laquelle Janek avait capturé sa vidéo a disparu.

Panamza s'est procuré des images -capturées le 24 janvier- de l'état du chantier entamé l'été dernier et visiblement terminé.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

Surprise, surprise : l'installation qui a permis de filmer confortablement le départ tonitruant des terroristes -ainsi capturé sous le meilleur angle- n'est plus.

Ce qui semblait constituer une terrasse a finalement laissé place à un toit gris et dorénavant hermétique.

Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo « amateur » était falsifiée (Panamza)

HICHAM HAMZA

HICHAM HAMZA

Mise à jour du 09.02.2015

* Rectification : plusieurs lecteurs du site ont fait remarquer, en partie commentaires ou par email, le caractère erronné de la conclusion. Ce qui semblait être un toit était en réalité une couvertine. Dont acte.

* Droit de réponse : ce lundi 09 février, vers 12h30, l'auteur de ces lignes a reçu un email adressé, selon le nom figurant dans la partie expéditeur, par un certain "Francis Carrière". Le courriel est signé "MB". La veille, Panamza avait proposé à Martin Boudot, auteur de la vidéo retouchée, d'adresser sa version des faits au sujet des questions soulevées dans cet article. Piqué au vif, l'homme s'était plaint, à juste titre et via les réseaux sociaux, de ne pas avoir été sollicité au préalable. Voici donc son texte -ô combien caustique- dans son intégralité, accompagné des observations -entre parenthèses et en caractère gras- de Panamza.

Les théories du complot, c'est parfois drôle (En effet. De même que sont parfois hilarantes les leçons de journalisme prodiguées par certains sophistes et autres artisans du verbiage).

Mais quand vous vous retrouvez au milieu, c'est tout de suite beaucoup plus terrifiant. (MB affiche d'emblée la couleur : un subtil mélange de condescendance et de diabolisation en employant le terme -à la mode- pour tenter de discréditer son contradicteur : "complotiste").

Depuis quelques semaines, des sites prétendent que ma vidéo des attentats de Charlie Hebdo est fausse, qu'elle a été retouchée, qu'on peut y voir des policiers regarder les frères Kouachi sans rien faire etc. (Panamza n'avait jamais évoqué sa vidéo auparavant. Mais il était visiblement tentant pour MB d'amalgamer Panamza avec ces sites sulfureux).

L'article de ce site en particulier me met en cause.

http://www.panamza.com/080215-charlie-video
https://www.facebook.com/panhamza/posts/49667239714012
8…

Je ne voulais pas leur répondre puis j'ai vu que sur Facebook 19 000 personnes "like" ce site. Soit autant que le nombre de personnes qui "like" Cash Investigation, l'émission de France 2 pour laquelle je travaille. Hallucinant.

(Amen. Vous l'aurez compris, cher lecteur : il est noble de "liker" Cash Investigation et "hallucinant" d'en faire autant pour Panamza qui peut pourtant se targuer d'avoir publié bon nombre d'enquêtes fouillées dont MB et ses camarades-de-combat-pour-la-vérité-vraie n'oseraient même pas aborder les thèmes en conférence de rédaction).


Cette fois j'ai donc répondu, point par point. En espérant convaincre certains de ces lecteurs que ces idéologues du complot jouent sur leurs peurs pour mieux leur vendre leur salade. ("Idéologue du complot"? Concrètement, nous n'en saurons pas davantage sur le sens exact que recouvre une telle expression nébuleuse. Dommage. Retenez cependant qu'à France 2, on ne vous "vend jamais "de salade", hein…)

Le texte ci-dessous.

Bonjour cher Panamza, voici mon droit de réponse. Merci de le publier intégralement en dessous de votre "enquête". Même si je ne doute évidemment pas de votre honnêteté, merci de ne pas le modifier ("Évidemment pas"… Petit farceur).

"Cher Panamza, On m'a dit de ne pas vous répondre. Qu'il ne fallait pas donner d'importance à "des complotistes". Que vous n'en valiez pas la peine. Le problème c'est qu'à force de vous ignorer, on vous renforce dans vos convictions. On valide l'idée selon laquelle nous avons quelque chose à cacher, qu'il y a quelque chose de louche, qu'il y aurait même un complot… (Dormez tranquille, braves gens : "on" ne vous "cache" absolument rien et rien n'est jamais "louche"… dans le monde des Bisounours? Quant au terme de "complot", autant le rayer du dictionnaire puisqu'à en croire la formule alambiquée de MB, le mot ne recouvre aucune réalité dans l'histoire humaine).


Et puis il y a quand même 19 000 personnes (Des égarés? Des délinquants? Des âmes perdues?) sur Facebook qui croient ce que vous dites (ils n'ont nul besoin de "croire", cher prêcheur, puisque Panamza présente essentiellement, depuis un an et demi, des faits étayés par des sources incontestables) vous le "journaliste indépendant" au-dessus de tout soupçon de manipulation. Alors voici point par point les réponses à vos questions.
Ah oui en fait, puisque vous êtes un si bon enquêteur (Trop de condescendance tue l'art de la condescendance, MB), je suis un peu surpris que vous n'ayez pas réussi à trouver mes coordonnées téléphoniques, mon adresse mail, mon Facebook ou mon Twitter. C'est dommage, ça vous aurait évité ce moment gênant (Gênant pour qui exactement? C'est bien vous, cher MB, qui avez réagi, par un dimanche soir, sur Facebook et moins de trois heures après la publication de cet article. Sans doute étiez-vous un brin embarrassé pour réagir aussi vite?
)

- Commençons avec le titre de votre "enquête" : "Attentat à Charlie Hebdo : la vidéo "amateur" était falsifiée."

C'est vrai que ça envoie. Même pas un conditionnel. L'affaire est conclue. Vous avez enquêté et la République va trembler. Mediapart n'a qu'à bien se tenir (Trop de sarcasmes tue l'art du sarcasme, MB). Vous m'accusez donc, sans jamais m'avoir contacté, d'avoir trafiqué ma vidéo… C'est grave comme accusation. (Et c'est "grave" de prétendre avoir été "accusé". La question posée dans l'article était la suivante : "Reste à savoir qui est à l'origine de cette altération volontaire de la vidéo : le journaliste Martin Boudot, son agence de presse (Premières Lignes), les chaînes récipiendaires du document ou un mystérieux intermédiaire ?" MB n'est donc pas désigné comme "accusé" : il figure simplement parmi une quantité d'individus susceptibles d'avoir altéré le document. Nuance).

Mais rassurez-vous cher Panamza, je vous ferai grâce de vous poursuivre en diffamation, je sais à quel point les temps sont durs pour les complotistes (Merci de m'épargner la guillotine sur la place publique, ô valeureux chevalier blanc du journalisme).

Il faut bien se démarquer, le secteur est surchargé. Vous êtes déjà pardonné (Merci encore, mon doux seigneur).

- "Journaliste de l'agence Premières Lignes, Martin Boudot apparaît curieusement (vers 0'33) dans la vidéo qu'il aurait pourtant lui-même filmé -aux alentours de 11h40."

Aïe… Ca commence mal… Pour tout vous dire, nous étions deux à filmer. La vidéo dont vous parlez, c'est celle de l'un de mes collègues. C'est lui le premier à avoir envoyé sa vidéo, à I-Télé donc. C'est pour cela qu'on me voit. Pour ma part, j'enverrai ma vidéo au JT de France 2 une heure plus tard. C'est aussi simple que cela. Désolé Panamza (Mea culpa : c'est probablement un autre membre de l'agence qui a filmé la première vidéo -dans laquelle on peut reconnaître MB, le pied posé sur un curieux cordon blanc qui longe -raccorde?- son smartphone pointé en direction des terroristes…)

- "Sollicité, ensuite par CNN et BFM TV au sujet de son scoop, Boudot a tenu une étrange déclaration sur l'antenne de RMC. Lors de son entretien (réalisé -en direct- le lendemain matin) avec Jean-Jacques Bourdin, le jeune homme, (…) a ainsi affirmé incidemment (à 11'50) qu'"on connaissait bien le responsable de la maintenance" qui fut abattu -en premier- par les terroristes. Problème : l'homme en question -dénommé Frédéric Boisseau et salarié de Sodexo- effectuait là son premier jour dans l'immeuble dans lequel se côtoyaient, depuis l'été dernier, les équipes de Charlie Hebdo et de Premières Lignes."

Là vous m'avez eu… En flagrant délit de mensonge ! Beau travail Woodward ! (Woodward, une belle référence éculée et américano-centrée que voici….) Allez, je vous donne mon explication (Une "explication" qui est loin de tout expliquer, précisément…).

Au moment des faits, nous apprenons que "le monsieur de la maintenance a été tué". Aucun nom nous ai donné. Pour nous c'est évident, il s'agit du "Monsieur de la maintenance" que nous voyons tous les jours, à l'accueil. Puis nous sommes trimbalés de cellule de crise en cellule de crise, d'hôpital en hôpital, de déposition en déposition. Au moment de l'interview avec RMC, je crois encore qu'il s'agit de la personne de l'accueil que nous voyons tous les jours. Ce n'est que quelques heures plus tard que nous apprendrons qu'il s'agit de Frédéric Boisseau. (C'est ballot : le nom et le visage de Frédéric Boisseau étaient connus des rédactions dès le 7, en début de soirée, avant d'être médiatisés au cours de la soirée et dans la nuit du 7 au 8. Donc, le 8 au matin, MB, journaliste au coeur de l'évènement de la veille, n'avait toujours pas dissipé ce prétendu quiproquo? Lui qui a pourtant nécessairement vu -en portant secours aux blessés de Charlie Hebdo- le corps de la première victime, abattue DANS LE HALL D'ENTRÉE DE SON IMMEUBLE?)

Permettez-moi une question : quel serait l'intérêt pour nous de mentir sur ce point ? J'ai beau essayé de vous suivre mais à votre avis, on couvre qui exactement en mentant ? Les juifs ? La DGSE ? Sodexo ? Rastapopoulos ? (Seul un approfondissement réalisé par de futurs enquêteurs indépendants sur ce point précis permettra d'en savoir plus. Ne tirons pas, cher MB, des conclusions hâtives sur votre assertion qui est, de toute évidence, factuellement impossible).

- "Depuis le 7 janvier, les images filmées par Boudot et diffusées par l'ensemble des chaînes (y compris étrangères, comme CNN et Sky News) semblaient -au regard de leur aspect flou- avoir été capturées avec un ancien téléphone portable. En réalité, il n'en était rien : le document obtenu par la correspondante parisienne de Vice News révèle, pour la première fois, un format visuel digne des smartphones modernes. D'où cette question : pourquoi les chaînes de télévision ont-elle diffusé une version dégradée du document -pourtant historique- de Boudot?"

J'aime quand vous me posez des questions Panamza. Si seulement vous m'aviez contacté… Ma réponse : dans un premier temps, j'ai envoyé ma vidéo via mail. Du coup, la qualité a été compressée. Entraînes toi chez toi, tu verras que ça le fait aussi (Par mail? Depuis où? Ushuaïa? Raqqa? Katmandou? La grotte de Bora-Bora? Un envoi par mail, dans l'immédiateté de l'évènement, vers midi, pourquoi pas. Mais ensuite? Aucune chaîne de télévision ne vous sollicite, dans la journée du 7 et le lendemain, le document original? Aucun coursier à l'agence pour le déposer dans les compagnies audiovisuelles toutes situées entre Paris et Boulogne-Billancourt?)

Puis, quelques jours plus tard, nous avons mis à disposition la vidéo en bonne qualité (24 jours -et non quelques jours- pour découvrir, sur Youtube, une meilleure qualité relayée par un webmagazine US? Ah oui, ok… Le temps du voyage effectué par le cargo transatlantique qui transportait la K7 VHS…). Vice News fait partie des médias qui l'ont récupéré (Des médias? Lesquels? Seul Vice News a diffusé, à ce jour, la vidéo HD) . CQFD.

- "Reste à savoir qui est à l'origine de cette altération volontaire de la vidéo : le journaliste Martin Boudot, son agence de presse (Premières Lignes), les chaînes récipiendaires du document ou un mystérieux intermédiaire ? Un fait est acquis : s'il n'existe évidemment pas de "main invisible" capable de commander secrètement tous les organes de la presse écrite et audiovisuelle, une influence contraignante et passée sous silence s'exerce néanmoins dans la plupart des redactions importantes. Elle provient de la DGSE, bastion du contre-espionnage français."

Ah nous y voilà ! Je me disais aussi… Alors, Panamza je vous confirme : je n'ai jamais été contacté par la DGSE. Personne ne m'a demandé d'altérer l'image de ma vidéo. Pas la DGSE, ni le Mossad, ni les chinois du FBI. C'est juste une histoire de vidéo compressée par mail (Merci pour cette explication-culte soulignée par Panamza).

Ça fait moins rêver c'est sûre mais la vérité est parfois aussi simple (Vi, vi…).

- "Dans le journal télévisé de David Pujadas, le journaliste Franck Génauzeau, en charge du sujet, a prononcé ainsi (à 10'15) ce commentaire au sujet de la séquence affichée ci-dessous : "Il y a deux hommes sur cette image". C'est faux. En réalité, il y en a quatre : deux terroristes (au milieu de la rue) et, visibles juste au-dessus, deux inconnus -debouts sur une terrasse. (…) Aujourd'hui, il est possible d'affirmer que l'activité et l'identité de ce vidéaste -présent lors de ce moment crucial- ont été délibérément occultées par la presse traditionnelle."

Heu… Ok… Oui en effet sur la vidéo, il y a deux ouvriers qui filment également la scène… Je ne vous cache pas que lors d'un attentat, on parle plutôt des hommes qui ont tiré plutôt que de ceux qui les filment… (Digression amusante : il est question ici du commentaire précis -et inexact- du journaliste de France 2, pas de pseudo-conventions relatives à la voix-off d'usage "lors d'un attentat")

Je ne vous suis pas Panamza, où voulez-vous en venir ? (Réfléchissez, MB… Faire un travail journalistique en exposant une contre-vérité, ça vous dit quelque chose?)

- "À ce jour, une seule chose est certaine : la terrasse aux rebords blancs depuis laquelle Janek avait capturé sa vidéo a disparu. Panamza s'est procuré des images -capturées le 24 janvier- de l'état du chantier entamé l'été dernier et visiblement terminé. Surprise, surprise : l'installation qui a permis de filmer confortablement le départ tonitruant des terroristes -ainsi capturé sous le meilleur angle- n'est plus. Ce qui semblait constituer une terrasse a finalement laissé place à un toit gris et dorénavant hermétique."

Vous êtes géniaux Panamza (Merci MB, n'hésitez pas à vous abonner). Si je vous suis bien, les deux ouvriers polonais n'étaient en fait pas vraiment ouvriers et en plus la terrasse depuis laquelle ils ont filmé les deux assaillants n'existe plus. J'ai bon ? (Pas vraiment mais vous avez le droit de tirer vos propres conclusions hâtives)

Vous savez, au lieu de récupérer des images, vous pourriez vous déplacer (Ce fut le cas, merci du conseil, hein).

Je suis sympa, je viens de le faire pour vous. Je viens de prendre en photo la terrasse (Pas difficile quand on travaille juste en face mais merci quand même : vu le cordon policier encore en place, c'est sympa de me faciliter la tâche).

Je ne peux pas poster de photo ici dans les commentaires de Facebook alors je vous l'envoie par mail (oui j'ai trouvé votre adresse mail moi). Merci de la poster dans mon droit de réponse. Vous verrez que la terrasse est toujours là. Rien n'a changé. Absolument rien. Dommage parce que là, même moi j'ai failli y croire Panamza. Le coup de la terrasse qu'on fait disparaitre, fallait y penser.

Pour le reste, je vous laisse à vos propres conclusions et vos certitudes (Le lecteur aura bien compris que MB n'a, quant à lui, aucune certitude dogmatique).

Je ne répondrai que sur ce qui me concerne directement.
J'espère simplement que ça aidera certains de vos lecteurs à réfléchir (Repentez-vous, ô mes ouailles
).

Car si il peut être légitime parfois de se poser des questions sur la version officielle (Merci de nous autoriser à douter, ô grand seigneur de la Vérité-vraie), posez-vous aussi des questions sur ceux qui vous apportent une vérité officieuse, sans rien avoir vérifié (Brrr…. La tournure de pensée de MB vire dangereusement complotiste). Et rappelez-vous (mes enfants?) : l'addition de fausses informations ne fait pas une vérité (Amen).

Je ne sais pas ce qui me fait le plus peur Panamza (de voir l'altération de sa vidéo être exposée aux citoyens, peut-être?) : que vous profitiez des peurs pour exister (Combien pour la séance, docteur?) et vendre votre salade ou que vous soyez si persuadé du complot permanent que vous en oubliez les faits ("Complot permanent"? Nouvelle version du "Coup d'Etat permanent" de Mitterrand? Une définition du concept, Doc?).

Et surtout, je sais que c'est dur, mais essayez de contacter les personnes que vous mettez en cause (C'est déjà fait pour d'autres mais promis, juré : la prochaine que je vous mets en cause, je vous contacterai). Peut-être qu'après vous pourrez vous présenter – comme vous le faites sur votre site – comme un "Journaliste indépendant" (MB, bientôt juge suprême de la future Cour de la Presse-déontologique-et-officielle, seule habilitée à dire qui peut être journaliste? ) .

Sans rancune (MB est décidément trop bon avec les vils manants que sont les complotistes).

Je vous embrasse (Moi aussi. Des poutous partout).

Votre complotiste préféré (Ah la la, grosse confusion sémantique : c'est "comploteur" -et non complotiste. Le dernier terme est censé me désigner, voyons. Probablement un trouble suscité par l'émotion qui étreint MB sur le point de conclure ce "droit de réponse" qui fera assurément date dans les annales du journalisme d'investigation…)

MB

POST-SCRIPTUM 1 : pour clarifier le rôle de l'ouvrier polonais, Martin Boudot et l'agence Premières Lignes sont vivement encouragés par Panamza et de nombreux lecteurs qui se sont exprimés sur ce sujet à mettre en ligne l'intégralité de la vidéo originale. Un mois après les évènements du 7 janvier, le site de l'agence n'a toujours pas diffusé ces images pourtant historiques.

POST-SCRIPTUM 2 : Boudot fabule (encore?) en prétendant avoir été censuré.

POST-SCRIPTUM 3 : des lecteurs de Panamza ont fait savoir qu'il était tout à fait possible d'envoyer une vidéo HD -sans compression- via des serveurs externes (tels Wetransfer, Cloud ou Skydrive) et le service Gmail. A fortiori si la vidéo est de courte durée. Détail intéressant : le droit de réponse adressé aujourd'hui par Martin Boudot a été envoyé via sa propre boîte Gmail.

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