Une étude révèle comment le renseignement britannique travaille avec les médias pour dénigrer Jeremy Corbyn (MintPress News)

 Une étude révèle comment le renseignement britannique travaille avec les médias pour dénigrer Jeremy Corbyn
Article originel :  Study Reveals How UK Intelligence Works with Media to Smear Jeremy Corbyn
Par Alan Mc Leod*
MintPress News

Le chef du parti travailliste britannique Jeremy Corbyn prononce un discours à Londres, en Angleterre, le 27 novembre 2019, avant les élections générales du 12 décembre. Frank Augstein (c) AP

Le Royaume-Uni se rend aux urnes le 12 décembre pour un vote décisif qui décidera de l'avenir du pays. Comme en 2017, le Parti travailliste, sous la direction de Jeremy Corbyn, talonne le Parti conservateur au pouvoir dans les dernières semaines de campagne. Mais il ne deviendra pas Premier ministre si les services de sécurité britanniques devaient avoir un rôle dans les élections. Corbyn, souvent comparé à Bernie Sanders en termes d'idéologie, a passé des décennies dans le désert politique, une voix solitaire de gauche au sein d'un parti embrassant le néolibéralisme, le marché libre et les grandes entreprises. Et comme Sanders, son leadership a remis le socialisme à l'ordre du jour.

En tant que Premier ministre, Corbyn promet de nationaliser de larges pans de l'économie, notamment l'eau, l'énergie, les transports et les communications, d'augmenter le salaire minimum de plus de 20 pour cent, de supprimer les frais de scolarité universitaires, de reconstruire le Service national de santé, de fournir gratuitement l'accès à Internet haute vitesse à chaque foyer, de construire 100 000 logements sociaux chaque année et de lancer une révolution industrielle verte.

Sur la scène internationale, il a été un militant anti-impérialiste engagé pour la paix, dirigeant la résistance à la guerre en Irak au niveau national et a promis de refuser d'utiliser les armes nucléaires de la Grande-Bretagne. Il a aussi constamment défendu les droits des Palestiniens et s'est opposé aux tentatives de l'Occident de renverser les dirigeants latino-américains du pouvoir par des coups d'État.

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— The Labour Party (@UKLabour) November 21, 2019

Mais une nouvelle étude de Matt Kennard, un ancien journaliste du Financial Times, a montré que l'establishment militaire et les services de renseignement britanniques se sont surmenés pour mettre fin à la menace d'un gouvernement Corbyn. L'étude de Kennard sur la presse britannique montre que de hauts responsables des forces armées ou des services secrets ont été à l'origine d'au moins 34 scandales nationaux majeurs qui ont fait du dirigeant travailliste et militant pour la paix une menace pour le pays. Ces fuites ont fait l'objet de 440 articles dans la presse présentant Corbyn comme un danger pour la sécurité nationale depuis septembre 2015, date de son élection à la tête du Parti travailliste.

Une semaine seulement après son élection, le Sunday Times, l'un des journaux les plus influents du pays, a révélé qu'un " général de haut rang " avait prévenu que les forces armées prendraient " des mesures directes " pour arrêter un gouvernement Corbyn : en d'autres termes, menacer un coup d'Etat militaire comme celui qui a détruit le poste de son ami Evo Morales en Bolivie le mois dernier. Le même mois, un ancien chef du MI5, l'agence de renseignement interne britannique, a révélé dans le Times que l'organisation avait passé des années à espionner de nombreux membres de l'équipe de Corbyn, les croyant être une menace pour la nation.

En 2017 et 2018, la presse était pleine d'accusations anonymes selon lesquelles Corbyn aurait effectivement passé les années 1980 comme espion communiste. Le journal britannique le plus lu, The Sun, a affirmé qu'il avait été un espion tchèque et un agent pour la police secrète est-allemande. Ce n'est qu'après la répudiation officielle du commissaire fédéral allemand aux archives que l'histoire a été discrètement abandonnée. Le rapport de Kennard peint l'image d'une presse intimement liée à l'état profond, ce dont il a discuté avec MintPress News durant l'été.

Les études académiques de la couverture de Corbyn ont également montré que les médias de masse ont montré une profonde hostilité envers lui et son projet. Un rapport de la London School of Economics comprenait une section entière intitulée "Delegitimization through Ridicule, Scorn, and Personal Attacks" ("Délégitimation par le ridicule, le mépris et les attaques personnelles"). La presse l'a décrit comme un ami de "tous les djihadistes déséquilibrés lourdement barbus qui aspirent à la destruction de l'Occident", alléguant qu'il "se félicite de la perspective d'un astéroïde anéantissant l'humanité" et "envisage de transformer la Grande-Bretagne en Zimbabwe". Les partisans du parti Travailliste, qui comprennent une grande majorité de millénaires et de la génération Z, ont été dépeints comme des psychopathes enragés et meurtriers qui ont l'intention d'envoyer leurs opposants dans les goulags ou de tuer tous les députés anticorbyn en les noyant dans les rivières.

Des conservateurs britanniques posent à côté d'un panneau d'affichage ridiculisant Jeremy Corbyn à Londres, le 25 novembre 2019. Matt Dunham | AP

Un journal a publié un article intitulé "Revealed- the evil monster hanting Jeremy Corbyn's Past" ("Révélation- le monstre maléfique qui hante le passé de Jeremy Corbyn") sur son arrière-arrière-arrière-grand-père, qui était un patron cruel dans une maison pauvre victorienne. Corbyn s'est excusé plus tard de ne pas remonter dans le temps jusqu'aux années 1860 et de ne pas l'avoir arrêté. Il a également été qualifié de terroriste, de sympathisant de l'IRA et d'antisémite par une presse de plus en plus hostile.

Plus étonnant peut-être, neuf jours après l'assassinat du député travailliste Jo Cox lors d'un attentat terroriste, le Daily Mail a publié un article exigeant que nous "tuions" le vampire Corbyn, avant qu'il ne soit trop tard. Le terroriste de la mosquée de Finsbury Park, Darren Osborne, un lecteur du Daily Mail, s'est rendu à Londres pour tuer Corbyn, mais a décidé d'attaquer la mosquée après l'échec de son attaque contre Corbyn. Le discours haineux notoire du Daily Mail a déjà été condamné par la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, mais le gouvernement conservateur n'a pris aucune mesure contre lui.

Avant les élections de 1924, où le parti travailliste était proche de gagner, le MI5 a falsifié un document appelé la lettre Zinoviev, prétendant provenir de Grigory Zinoviev, un haut fonctionnaire de l'URSS au Parti communiste britannique, appelant à un soulèvement violent. La fausse lettre a été imprimée sur la première page du Daily Mail et est largement considérée comme ayant fait basculer l'élection vers les conservateurs.

L'ancien journaliste de la BBC Paul Mason a déclaré qu'il s'attendait à ce qu'il y ait un mensonge par jour dans les sept derniers jours de cette élection, parce que, dit-il, "nous sommes au point de progrès décisif... sur le point d'un réel changement" au Royaume-Uni.

La Grande-Bretagne se trouve à la croisée des chemins entre l'avenir conservateur du Brexit, dirigé par Boris Johnson, un système de santé privatisé et une relation étroite avec Donald Trump, ou un gouvernement travailliste fortement progressiste dirigé par Corbyn. Il est clair que les services de sécurité en préfère un en particulier.

* Alan MacLeod est rédacteur à MintPress ainsi qu'universitaire et rédacteur pour la revue Fairness and Accuracy in Reporting. Son livre, Bad News From Venezuela : Twenty Years of Fake News and Misreporting a été publié en avril.

Traduction SLT

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