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Le ministre britannique de la Défense avertit d’une guerre avec la Russie et la Chine d’ici 2030 (WSWS)

par Thomas Scripps 19 Juillet 2023, 06:23 Ben Wallace OTAN Guerre Chine Russie Ukraine Grande-Bretagne USA Articles de Sam La Touch

Le ministre britannique de la Défense avertit d’une guerre avec la Russie et la Chine d’ici 2030
Par
Thomas Scripps
WSWS, 19.07.23

 

Le ministre britannique de la défense sortant, Ben Wallace, a levé le voile sur les discussions menées au sein du gouvernement au sujet d’une guerre avec la Russie et la Chine.

Wallace a déclaré au Sunday Times ce week-end qu’il quitterait son poste de ministre de la Défense lors du prochain remaniement ministériel et qu’il démissionnerait de son poste de député aux prochaines élections.

Son départ cette année était prévu de longue date, même si Wallace espérait se tourner vers de nouveaux horizons plutôt que de prendre sa retraite politique. Il a refusé de se présenter à la direction du Parti conservateur l’année dernière, malgré une grande popularité auprès des députés et des membres, dans l’espoir d’être nommé secrétaire général de l’OTAN. Mais ce projet a été torpillé par le gouvernement Biden en raison du risque d’aliénation de l’Allemagne et de la France, et Jens Stoltenberg a été persuadé de rester en poste pour une année supplémentaire.

Il a déclaré au Times avec amertume: “Pourquoi ne pas soutenir votre allié le plus proche lorsqu'il présente un candidat? Je pense que c'est une question légitime”.

L’article avec son interview porte ce titre: «Pourquoi je quitte la politique – et mes craintes que nous soyons en guerre d’ici 2030».

Wallace y fait preuve d’une franchise inhabituelle. Il prévient: «Vers la fin de la décennie, le monde sera beaucoup moins sûr, plus insécurisé. Je pense que nous nous retrouverons dans un conflit. Qu’il s’agisse d’un conflit froid ou chaud, je pense que nous serons dans une position difficile».

Il cite la Russie et la Chine comme les plus grands dangers, Vladimir Poutine ayant la capacité, «dans les trois ou quatre prochaines années, de se déchaîner» et disposant d’une «doctrine pour l’utilisation d’armes nucléaires tactiques». Bien entendu, les États-Unis, principal allié de la Grande-Bretagne, se réservent également le droit d’effectuer une première frappe nucléaire.

Le pronostic de Wallace pourrait bien être optimiste. La Grande-Bretagne est déjà profondément impliquée dans un conflit militaire avec la Russie. Elle fournit munitions et équipements, dont des armes lourdes et de pointe, formation, renseignement et une assistance aux forces spéciales de l’armée ukrainienne dans une guerre menée sous la direction de l’OTAN. Elle fournit des forces importantes pour les manœuvres de l’OTAN dans d’autres pays frontaliers de la Russie.

Mais en l’absence d’un large enthousiasme populaire pour une guerre avec une des principales puissances nucléaires, la classe dirigeante britannique s’appuie fortement sur les médias et l’ensemble de l’establishment politique pour présenter une situation où le Royaume-Uni est en quelque sorte à distance suffisante de la guerre en Ukraine pour être à l’abri des conséquences.

Wallace est le premier politicien du gouvernement à évoquer publiquement la réalité que la Grande-Bretagne et l’ensemble de l’OTAN sont en marche vers une guerre directe avec la Russie et même la Chine. Ses commentaires sont un aveu que l’élite dirigeante entraîne la population du Royaume-Uni dans un conflit potentiellement cataclysmique.

Wallace est bien placé pour le savoir. Il est le ministre du gouvernement resté le plus longtemps en fonction et le secrétaire à la Défense conservateur le plus longtemps en fonction depuis Winston Churchill. Et cela, dans une période de turbulences politiques extraordinaires, avec des luttes de factions sur le Brexit et le remplacement de deux premiers ministres en autant de mois. Ancien capitaine des Scots Guards, il est extrêmement proche des chefs de l’armée.

Malgré le refus essuyé récemment relatif au poste de secrétaire général de l’OTAN, l’impérialisme américain le considère comme un point vital de connexion et de stabilité au Royaume-Uni. Au milieu des décombres du bref gouvernement de Liz Truss, Wallace fut convoqué à une réunion secrète de dernière minute à Washington pour des discussions que son secrétaire d’État James Heappey a décrites comme «dépassant l’entendement».

Le secrétaire de presse du Pentagone expliqua: «Il est ici aujourd’hui pour discuter de la situation en Ukraine et des efforts conjoints des États-Unis et du Royaume-Uni pour soutenir l’Ukraine, et pour réaffirmer les liens transatlantiques et la coopération que nos deux pays partagent lorsqu’il s’agit de questions telles que la Russie».

Il est probable qu’on a dit à Wallace lors de cette visite de ne pas se présenter à la prochaine élections à la direction du Parti conservateur, afin de conserver une personnalité sur laquelle les États-Unis pouvaient compter à la tête de l’armée britannique durant la transition vers un nouveau cabinet. Peu surprenante est sa colère d’avoir été contrarié dans son ambition de diriger l’OTAN.

Le Times écrit lundi dans un éditorial: «En pleines crises nationales et internationales, il a servi efficacement la Grande-Bretagne et lui a permis de jouer un rôle crucial dans la défense de l’Occident. Si les choses avaient été légèrement différentes, il pourrait aujourd’hui occuper un poste encore plus important. En l’état actuel des choses, il quitte la vie publique alors que la réputation de la Grande-Bretagne est rehaussée et la sécurité transatlantique renforcée…»

«Plutôt que de chercher un terrain d’entente mythique pour un règlement négocié qui récompenserait l’agression russe, il a mené la lutte sur le plan des idées et de l’idéologie».

C'est pourquoi, comme le dit favorablement le Times, Wallace a été un si ardent défenseur de l'augmentation des dépenses militaires. Connaissant les plans de guerre de l'OTAN comme personne au Royaume-Uni, il est douloureusement conscient des énormes ressources qui doivent être mobilisées pour rendre l'impérialisme britannique apte au combat, et des attaques qui doivent donc être lancées contre les dépenses sociales et la classe ouvrière.

Des rumeurs avançaient sa démission en février, parce qu’il n’avait pas obtenu du Premier ministre Rishi Sunak et du ministre des finances Jeremy Hunt l’engagement de consacrer 3 pour cent du PIB à la défense et une augmentation de 8 à 11 milliards de livres [de 9,2 à 12,8 milliards d’euros] des dépenses militaires dans les deux prochaines années. Il s’est finalement contenté d’une promesse d’augmentation des dépenses militaires de 2,5 pour cent, qu’il a dit aller« dans la bonne direction, et bien sûr, on ne pouvait en avoir besoin plus rapidement».

Dans l’interview de dimanche où il annonçait sa démission imminente, Wallace a déclaré que « sa plus grande fierté est la guerre qu’il a menée à Whitehall pour la défense. J’ai couplé tout cela à une augmentation du budget de 24 milliards de livres [28 milliards d’euros] à une réforme de la Défense et à un investissement dans la modernisation de l’armée», a-t-il déclaré.

«J’ai repris un ministère qui avait subi 30 ans de coupes budgétaires et j’ai reconnu que l’ensemble du gouvernement s’occupait de Santé et d’Éducation, tandis que la Défense n’était qu’une dépense discrétionnaire. Ce que j’espère avoir réussi à faire ces quatre dernières années, c’est à débloquer de l’argent véritablement neuf et gagner l’argument que la Défense est essentielle».

Selon le journal, Wallace a ajouté que les dépenses militaires pourraient «constituer une ligne de démarcation lors des élections générales. Pour l’instant, je vois les travaillistes éviter complètement la question du financement de la Défense», a-t-il déclaré.

En fait, il n’y a aucune différence entre la position des conservateurs et celle des travaillistes sur l’armée et la guerre en Ukraine, les travaillistes étant encore plus chauvins. Le ministre de la Défense de l’ombre travailliste, John Healey, a critiqué les dépenses militaires des conservateurs dans un discours au parlement vendredi dernier: «Elles représentaient 2,5 pour cent du PIB en 2010. Nous en sommes très loin pour les 13 années qui ont suivi 2010».

Il a mis le gouvernement au défi de «reprendre le projet du Parti travailliste de passer au test OTAN les principaux programmes de défense afin de s’assurer que nous respectons nos obligations envers l’OTAN».

Si les travaillistes n’ont pris aucun engagement en matière de dépenses militaires, cela correspond à l’insistance du chef du parti, Sir Keir Starmer, qui a dit ne vouloir faire aucune promesse de dépenses avant d’entrer en fonction, en tant que parti de la «responsabilité fiscale» et «parti de l’OTAN».

Le commentaire de Wallace montre néanmoins que le «débat» politique entre les deux principaux partis sera de plus en plus dominé par la nécessité de trouver plus d’argent pour la guerre, en s’attaquant aux salaires et aux services sociaux comme les soins de santé. Cela s’accompagnera inévitablement de nouvelles vagues de lois répressives contre les grèves, les manifestations et la liberté d’expression.

Les plans de guerre de la classe dirigeante sont très avancés. Ils doivent être contrebalancés et battus par une stratégie socialiste, basée sur l’opposition qui se développera dans la classe ouvrière face aux rigueurs exigées par les fauteurs de guerre.

(Article paru d’abord en anglais le 18 Juillet 2023)

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