Israël provoque les US dans un conflit avec l’Iran, mais les médias ignorent le danger
Mondoweiss.net, 30.12.23
James North, écrit : “En plus de tuer des milliers de Palestiniens à Gaza, Israël a attaqué couramment au moins quatre autres pays de la région : l’Iran, le Yémen, la Syrie et le Liban. Pourquoi les médias maintiennent-ils le public américain dans l’ignorance ?” La réponse est, comme James North le sait certainement, que sur toute question concernant Israël et/ou la Palestine, l’establishment politique juif fixe les règles et agit comme un censeur. [ASI]
Depuis des années, ce site met en garde contre les tentatives d’Israël, et en particulier de Benjamin Netanyahou, d’entraîner les États-Unis dans une guerre plus vaste au Moyen-Orient, notamment avec l’Iran. Nous avons également régulièrement accusé les médias grand public américains d’ignorer ce danger.
Aujourd’hui, la menace est plus grande que jamais. Et, fidèles à eux-mêmes, le New York Times, la National Public Radio et d’autres continuent de l’occulter, traitant M. Netanyahou comme le chef, certes malmené, mais honnête, d’un Israël qui ne cherche qu’à se défendre.
Pendant plus d’une décennie, le principal objectif de M. Netanyahou a été de détruire le programme iranien présumé (et non prouvé) de fabrication d’armes nucléaires. Il a ouvertement tenté de saboter l’accord nucléaire conclu avec succès par l’administration Obama en 2015, puis a vigoureusement encouragé la décision abrupte de Donald Trump de mettre fin à l’accord trois ans plus tard. En secret, Israël a mené une longue campagne de sabotage contre l’Iran, qui comprenait la cyberguerre et des assassinats réels à l’intérieur du pays, y compris le meurtre d’un scientifique iranien, Mohsen Fakhrizadeh, en novembre 2020. M. Netanyahou voulait provoquer des représailles iraniennes, qui attireraient les États-Unis et, espérait-il, déclencheraient une attaque américaine qui retarderait, voire détruirait, le programme nucléaire de Téhéran.
Depuis le 7 octobre, les enjeux pour Netanyahou sont beaucoup plus importants. Les Israéliens lui reprochent l’attaque du Hamas et les sondages d’opinion montrent que sa popularité n’a jamais été aussi faible. Un certain nombre de commentateurs israéliens l’ont qualifié de pire dirigeant de l’histoire du pays. Si une poignée de membres de sa propre coalition à la Knesset l’abandonne, son gouvernement tombera et il sera battu lors de nouvelles élections. Pire encore, les procès en cours contre lui pour corruption seront relancés et il pourrait bien finir en prison.
Le fait d’entraîner les États-Unis dans un conflit avec l’Iran le distraira de ses propres problèmes et lui donnera le temps de manœuvrer. C’est ainsi que le 24 décembre, une attaque aérienne israélienne a été lancée contre l’Iran.
Le 24 décembre, une frappe aérienne israélienne a assassiné le principal commandant iranien en Syrie, Razi Mousavi. La toujours précieuse experte irano-américaine Trita Parsi, a posé la question suivante : “Israël a-t-il tué un commandant iranien pour provoquer une guerre plus ample ?”
La semaine dernière également, une cyberattaque a “provoqué l’arrêt soudain des deux tiers des stations-service iraniennes”, une nouvelle tentative de sabotage sur laquelle Israël a apposé ses empreintes digitales. Aucun pays ne pourra ignorer indéfiniment de telles provocations.
(M. Netanyahou n’est pas le seul dirigeant israélien à vouloir que les États-Unis attaquent l’Iran. L’ancien premier ministre Naftali Bennett vient de publier un article d’opinion dans le Wall Street Journal intitulé : “Les États-Unis et Israël doivent s’attaquer directement à l’Iran”. Il y révèle deux attaques israéliennes secrètes à l’intérieur de l’Iran pendant son mandat de premier ministre (2021-2022) : la destruction d’une base de drones et l’assassinat d’un commandant militaire iranien. Après la publication de l’article, certains responsables israéliens ont critiqué M. Bennett “pour avoir révélé des informations classifiées. Ils ont affirmé qu’il mettait potentiellement le pays en danger”).
Le New York Times a publié un bref article sur la frappe aérienne du 24 décembre qui a tué Ravi Mousavi en Syrie. Mais l’article était un modèle de malhonnêteté. Le journal a feint l’ignorance dans la première phrase de l’article : “L’Iran a accusé lundi Israël d’avoir tué un militaire de haut rang lors d’un tir de missile en Syrie, alors que l’on craint de plus en plus que la guerre à Gaza ne dégénère en conflit régional”. Nous n’apprenons nulle part que de nombreux observateurs, y compris certains Israéliens, pensent que Netanyahou pourrait en fait souhaiter un conflit plus large, tant qu’il peut y impliquer les États-Unis.
La National Public Radio a été encore pire. Ces derniers jours, la chaîne a diffusé trois reportages, dont un d’un correspondant dans la région. Les émissions étaient uniformément ineptes. Elles ont à peine mentionné l’assassinat provocateur de Mousavi par Israël. Dans l’un d’eux, la présentatrice Leila Fadel a posé la question suivante : “Les États-Unis ou l’Iran veulent-ils vraiment que cela devienne une guerre régionale ?” D’une manière ou d’une autre, elle a oublié d’ajouter Israël ou Netanyahou à sa question, alors que quiconque suit l’histoire en utilisant une série de sources non américaines, y compris en Israël même, aurait su qu’il fallait élargir l’enquête.
Le rapport du Washington Post ne contient qu’une seule phrase à l’emporte-pièce sur le fait qu’une “frappe aérienne” menée par une force aérienne anonyme a tué un “officier supérieur [iranien]” en Syrie. C’est tout.
Bien entendu, la situation dans la région est compliquée. Ansar Allah, les alliés de l’Iran (communément appelés les Houthis) qui contrôlent une grande partie du Yémen, ont attaqué la navigation en mer Rouge, et le Hezbollah, le mouvement politico-militaire du Sud-Liban également allié à l’Iran, s’est affronté à Israël de l’autre côté de leur frontière. (L’estimable Mitchell Plitnick de ce site a expliqué en détail comment la réponse boiteuse de l’administration Biden à la crise du transport maritime en mer Rouge pourrait également déclencher un conflit plus large). Il est douteux que même Benjamin Netanyahou veuille élargir le conflit pour faire intervenir l’un de ces deux autres acteurs.
Mais ce qui rend l’assassinat provocateur du général Mousavi et la dernière cyberattaque d’Israël encore plus dangereux, c’est qu’ils augmentent également le risque d’un accident mortel. Revenons en juillet 1988, lorsque les tensions dans la région étaient tout aussi vives. Dans le détroit d’Ormuz, un navire de guerre de la marine américaine a accidentellement abattu un avion de ligne civil iranien, tuant les 290 personnes à bord. L’Iran a fait preuve de retenue et le conflit n’a heureusement pas dégénéré.
Aujourd’hui, le danger est sans doute encore plus grand. Israël continue d’assassiner des milliers de civils palestiniens à Gaza et d’attaquer au moins quatre autres pays de la région : l’Iran, le Yémen, la Syrie et le Liban. Le dirigeant désespéré d’Israël lance les dés pour la dernière fois, et l’administration Biden le laisse s’en tirer à bon compte, tandis que les médias américains maintiennent le public dans l’ignorance. Les risques d’une plus grande tragédie sont élevés.
Traduction: Arretsurinfo.ch