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Les frappes de missiles américaines, britanniques et françaises contre la Syrie augmentent le risque d’une guerre catastrophique (WSWS)

par Barry Grey 18 Avril 2018, 14:43 Opération Hamilton Bombardements Syrie USA Grande-Bretagne France Impérialisme

Damas bombardé (c) © AP Photo Hassan Ammar

Damas bombardé (c) © AP Photo Hassan Ammar

Immédiatement après l’attaque des missiles dirigée par les États-Unis contre la Syrie, ce week-end, les préparatifs d’une guerre plus vaste susceptible de déclencher une catastrophe nucléaire sont en cours.

 

La témérité de la politique américaine ne fait qu’augmenter. À peine débarrassée du carnage laissé par plus de 100 missiles de croisière, l’ambassadrice américaine aux Nations Unies, Nikki Haley, se vantait que les États-Unis restaient « prêt à tirer ». Haley a déclaré que les troupes américaines resteraient en Syrie et a annoncé que l’Administration Trump dévoilerait de nouvelles sanctions lundi contre les entreprises russes faisant des affaires avec Damas.

La Russie a riposté en annonçant qu’elle améliorait les défenses antimissiles syriennes.

De nombreux commentaires des médias ont critiqué l’attaque « limitée » lancée par les forces navales et aériennes américaines, britanniques et françaises comme insuffisante et ont exigé une offensive militaire plus étendue et plus soutenue. Le New York Times a cité le sénateur républicain Lindsey Graham : « Je crains que lorsque la poussière retombera, cette frappe soit perçue comme une réponse militaire faible et qu’Assad ait payé un petit prix… »

Le Washington Post dans son éditorial principal dimanche a attaqué Trump pour avoir insinué de nouveau qu’il retirera les troupes américaines de la Syrie. Le journal a souligné l’immense territoire occupé par les troupes américaines et les forces par procuration des États-Unis et a exigé que Trump « renforce davantage » la position américaine sur le terrain afin de forcer le départ du Premier ministre syrien Bashar al-Assad.

Dans un article en première page, David Sanger et Ben Hubbard du New York Times ont soutenu dimanche que le Pentagone prétendait que les frappes avaient sérieusement endommagé le prétendu programme d’armes chimiques d’Assad. Ils ont écrit : « S’il est facile de faire exploser les installations chimiques de M. Assad, il est aussi relativement simple pour lui de les reconstituer ailleurs, ou de se tourner vers une substance disponible dans le commerce comme le chlore pour en faire un poison que n’importe quelle nation est autorisée à posséder. »

Les bases de nouvelles provocations et de nouveaux prétextes d’agression militaire sont déjà posées. Si ce ne sera pas la mise en scène d’une autre attaque chimique, le prochain casus belli pour la guerre pourrait bien être une attaque terroriste ou une agression contre les troupes américaines au Moyen-Orient attribuée à Assad.

Pendant plus de 25 ans, les États-Unis se sont engagés dans une guerre continuelle, justifiant chaque conflit par de fausses allégations d’atrocités commises ou imminentes par le pays ciblé : « des armes de destruction massive » visant l’Irak, un massacre imminent de civils visant la Libye, et maintenant des attaques au gaz visant la Syrie.

La campagne médiatique menée ces dernières semaines contre la Russie et la Syrie pour de prétendues attaques toxiques était une opération orchestrée pour fournir un prétexte approprié à une attaque militaire qui, en fait, avait été planifiée des mois auparavant. L’empoisonnement présumé par le gouvernement russe de l’ancien agent double Sergei Skripal et de sa fille a été immédiatement suivi par la campagne médiatique sur l’attaque au gaz attribuée a régime d’Assad sur la ville de Douma, tenue à l’époque par des milices islamistes, soutenues par les États-Unis, qui luttaient pour renverser le régime soutenu par la Russie et l’Iran.

Des médias occidentaux complètement corrompus et malhonnêtes ont fait la promotion des affirmations du gouvernement sans produire aucune preuve pour les étayer, alors qu’il a à peine noté les preuves produites par la Russie et la Syrie exposant les revendications comme frauduleuses. L’attaque lancée au cours du week-end n’était pas une réponse à une attaque au gaz qui aurait eu lieu une semaine auparavant. Il s’agissait d’une attaque conjointe hautement coordonnée impliquant des missiles tirés des plates-formes navales et aériennes américaines, françaises et britanniques dans la mer Rouge, le nord du golfe Persique et la Méditerranée. Une telle action n’est pas le résultat d’une planification de quelques jours.

Maintenant, dans la foulée, la situation géopolitique internationale et les crises politiques internes des États-Unis et des puissances européennes ne font que s’accentuer.

Aux États-Unis, les préparatifs d’une guerre plus large au Moyen-Orient et la guerre politique contre Trump menée par des sections de la classe dirigeante et de l’État ont fusionné en un seul processus.

Le secrétaire à la défense James Mattis et les militaires ont décidé d’éviter un conflit avec la Russie pour l’instant, non seulement pour des raisons militaires, mais aussi pour des raisons politiques. Les grèves et les rébellions des enseignants contre les syndicats corporatistes se poursuivent et la crise politique à Washington s’aggrave. Le sentiment contre la guerre est répandu dans la classe ouvrière. Dans ces conditions, l’armée n’a aucune confiance dans la capacité de Trump à superviser les actions à l’étranger et à l’intérieur, qu’elle estime nécessaire pour renverser Assad et affronter la Russie.

Le politologue néoconservateur Max Boot a explicitement relié une expansion majeure de la guerre en Syrie avec le retrait de Trump dans une tribune du Washington Post intitulée « Les frappes aériennes au milieu des scandales ». « Tout comme Bush n’avait pas de plan en Irak au printemps 2003, aujourd’hui Trump n’a pas de plan pour la Syrie », écrit-il, ajoutant : « Si les États-Unis avaient un régime parlementaire, le Congrès pourrait passer une motion de “censure”, permettant ainsi à Trump de consacrer 100 pour cent de son attention à la lutte contre les accusations qui se multiplient contre lui sans la distraction pour diriger le gouvernement. »

Le New York Times a publié un éditorial écrit juste avant les frappes de missiles appelant le Congrès à adopter une nouvelle autorisation pour l’utilisation de la force militaire. Cette poussée en faveur d’une nouvelle justification légale de la guerre montre que la classe dirigeante se prépare à une intervention militaire beaucoup plus vaste. Elle sait qu’il y aura une opposition croissante et veut créer un cadre légal pour criminaliser la dissidence anti-guerre et interdire le discours anti-guerre.

En Europe également, les frappes de missiles ont intensifié la crise politique et sociale interne ainsi que les tensions avec l’Amérique. Le Premier ministre britannique Theresa May fait face à des demandes de débat parlementaire sur l’attaque syrienne, avec des sondages montrant un large sentiment anti-guerre et un scepticisme généralisé envers les allégations d’une attaque chimique par Assad. Les frappes aériennes ont exacerbé la colère populaire contre le président français Emmanuel Macron, qui fait face à une vague de grèves ferroviaires et à l’escalade des manifestations étudiantes.

En Allemagne, des sections des médias utilisent les grèves, que la chancelière Angela Merkel a soutenues sans y adhérer directement, pour réclamer le réarmement à grande échelle de l’Allemagne et une politique étrangère moins dépendante des États-Unis.

Le commentaire de Berthold Kohler, rédacteur en chef de Frankfurter Allgemeine Zeitung, qui a écrit : « L’enfant égoïste du bureau ovale force l’Allemagne à grandir en matière de politique étrangère. Cela n’arrivera pas si vite que la marine allemande reçoive des porte-avions et la Luftwaffe des missiles de croisière. Mais la volonté de l’Allemagne d’assumer plus de responsabilités dans le monde face au Trumpisme […] ne peut se limiter à applaudir les Français et les Britanniques […] La contradiction fondamentale de la politique étrangère allemande est d’avoir des normes morales et humanitaires élevées, mais d’avoir une capacité réduite pour les imposer « de manière vigoureuse » en cas d’urgence. Cette contradiction ne peut être résolue de quelque façon que ce soit par des vols de reconnaissance non armés. »

Ce serait une erreur fatale de confondre la décision tactique de l’armée américaine d’éviter pour l’instant un affrontement direct avec les forces russes en Syrie avec un changement de l’orientation stratégique de l’impérialisme américain vers une guerre plus large en Syrie et un affrontement militaire avec l’Iran et la Russie. La nature limitée des frappes de ce week-end reflète la prise de conscience au sein de l’armée américaine des conséquences potentielles de toute attaque militaire en Syrie.

Il ne fait aucun doute que si des forces russes avaient été touchées, le résultat aurait pu être des représailles russes. Mais ce n’est qu’une question de temps avant qu’une future attaque militaire déclenche un conflit direct entre les deux plus grandes puissances nucléaires du monde. Le président russe Vladimir Poutine lui-même a averti dimanche que de nouvelles attaques occidentales contre la Syrie conduiraient inévitablement au « chaos dans les relations internationales ».

Chacune de ces attaques souligne à quel point le danger d’une guerre massive aux conséquences catastrophiques est réel et actuel. Le monde est témoin d’une éruption de l’impérialisme américain et mondial qui menace de détruire la civilisation humaine. Cela ne peut être évité que par la mobilisation révolutionnaire de la classe ouvrière internationale pour mettre fin au capitalisme.

(Article paru d’abord en anglais le 16 avril 2018)

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