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Emmanuel Macron a fait des efforts extraordinaires pour soutenir la campagne de lobbying d'Uber afin de l'aider à perturber le secteur fermé des taxis en France (The Guardian)

par John Henley et Harry Davies 11 Juillet 2022, 10:57 Uber Macron Collaboration Capitalisme Economie France Articles de Sam La Touch

Une fuite révèle qu'Emmanuel Macron a secrètement soutenu le lobbying d'Uber en France.
Article originel : Emmanuel Macron secretly aided Uber lobbying drive in France, leak reveals
Par John Henley et Harry Davies
The Guardian, 10.07.22

Les messages divulgués montrent que le ministre français de l'économie de l'époque a dit aux dirigeants d'Uber qu'il avait négocié un "accord" secret.

 

 

Emmanuel Macron a fait des efforts extraordinaires pour soutenir la campagne de lobbying d'Uber afin de l'aider à perturber le secteur fermé des taxis en France, allant jusqu'à dire à l'entreprise technologique qu'il avait négocié un "accord" secret avec ses opposants au sein du cabinet français.

La fuite de fichiers comprenant des échanges de messages texte entre des dirigeants d'Uber et M. Macron révèle comment l'entreprise de taxis l'a identifié comme un allié clé lorsqu'il était ministre de l'économie et s'est tournée vers lui pour l'aider en coulisses.

Les fichiers suggèrent que le pro-entrepreneur Macron, qui a été réélu président français en avril, était suffisamment proche des dirigeants d'Uber pendant ses deux années au ministère de l'économie, de 2014 à 2016, pour qu'ils ne réfléchissent pas à deux fois avant de le contacter pour une éventuelle aide lorsque leurs locaux ont été perquisitionnés par les autorités fiscales et autres.
 

Mais le plus remarquable est que l'ex-banquier de Rothschild, alors âgé de 37 ans, a déclaré à Uber qu'il avait conclu un accord favorable à Uber avec un gouvernement socialiste amèrement divisé. Il semble que l'entreprise de la Silicon Valley ait fermé son service sans licence le plus controversé en échange de règles nettement plus légères pour un autre service.

Les messages dressent le portrait d'un politicien qui s'est montré, du moins au début, exceptionnellement conciliant envers Uber. "Merci cher Travis", a écrit le ministre de l'économie, de l'industrie et des affaires numériques au cofondateur de l'entreprise, Travis Kalanick, dans un échange de courriels fin 2014.

"Restons en contact et progressons ensemble. Cordialement, Emmanuel."
 

Le futur président était apparemment timide à l'idée de consigner ses rencontres en personne avec Kalanick dans son agenda public : sur les quatre révélées par la fuite, une seule, à Davos en janvier 2016, semble avoir jamais été rendue publique. En coulisses, cependant, les dossiers suggèrent que lui et ses assistants faisaient ce qu'ils pouvaient pour faciliter la vie d'Uber en France.



La "nation des startups

L'histoire d'Uber en France est celle d'une startup étatsunienne effrontée qui joue les durs au cœur de la vieille Europe ; de protestations, de répressions policières et de chauffeurs battus ; de coups bas numériques, d'arrestations de cadres, de poupées gonflables et de mots en F de Courtney Love. Le rôle remarquable joué par Macron, un jeune ministre ambitieux et déterminé à faire la révolution, n'a jusqu'à présent pas été raconté.
 

La présence d'Uber allait toujours poser des problèmes dans un pays qui prend les droits des travailleurs aussi sérieusement, et les défend aussi fermement, que la France. Pour beaucoup, y compris au sein du gouvernement, le modèle d'Uber était tout simplement anathème, synonyme de précarité de l'emploi et de précarisation du travail.

Outre l'opposition politique et juridique, les chauffeurs de l'entreprise ont dû faire face à la fureur physique des chauffeurs de taxi français, eux-mêmes soumis à un régime réglementaire comprenant jusqu'à 300 heures de formation obligatoire et un quota limité - et insuffisant - de licences de taxi qui, dans certaines villes, se négociaient jusqu'à 250 000 euros.

L'affrontement qui s'en est suivi a marqué la France assez profondément pour que le dictionnaire Larousse ajoute, en 2017, le mot ubérisation à son lexique : "La remise en cause d'un modèle économique par un nouvel acteur proposant les mêmes services à des prix inférieurs, réalisée par des indépendants plutôt que des salariés, le plus souvent via des plateformes de réservation sur Internet."
 

L'enthousiasme précoce de Macron pour Uber et ce qu'il estime qu'il représente est absolu. Nommé en août 2014, il n'a pas caché son ambition d'embrasser à la fois la nouvelle économie numérique et de secouer le marché du travail rigide de la France dans le but d'inverser la hausse du chômage, en particulier là où il est le plus élevé - chez les jeunes hommes peu qualifiés issus de l'immigration. Il voulait une "nation de startups", et Uber pouvait en être la vitrine.

Macron voulait qu'Uber montre à la France le potentiel de la nouvelle économie déréglementée ; son travail, insistait-il, était d'aider "les outsiders, les innovateurs". Interdire Uber, aurait-il déclaré à Mediapart, équivaudrait à renvoyer les jeunes chômeurs des banlieues délabrées "là-bas pour vendre de la drogue".

Les dossiers montrent que Macron a accueilli favorablement la contribution de l'entreprise. Avant une première rencontre entre Uber et Macron, un assistant ministériel a écrit à la direction française de l'entreprise pour lui demander explicitement ses "attentes en matière de réglementation", ainsi que l'impact estimé de son activité sur l'emploi et les coûts de transport...

Traduction SLT

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