Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Antiterrorisme. Quand le Canard enchaîné divague sur Kadhafi et le stigmatise sous le signe du terrorisme

par SLT 27 Août 2017, 08:38 Macron Task Force Vème République Terrorisme Canard enchaîné François Hollande Kadhafi Sarkozy Françafrique néocolonialisme Désinformation Impérialisme Articles de Sam La Touch

Depuis que Le Canard enchaîné a plié les élections françaises 2017 suite à la publication étayée des preuves d'emplois fictifs concernant l'entourage très proche de Fillon, il se sent pousser des ailes, si l'on puit dire concernant le volatile. Le Canard est au bord d'une ivresse similaire à celle qu'il avait connu en 1981 quand il avait contribué à l'élimination de Giscard d'Estaing suite à ses publication sur "l'Affaire des diamants de Bokassa" participant ainsi à l'avènement de la Mitterrandie. Comme quoi le journalisme d'investigation a un impact redoutable sur le cours des évènements politiques et des élections et l'on perçoit aisément que le volatile en soit donc un des derniers tenants dans une presse française sinistrée. Au point que dans sa rubrique "Brosse à reluire" (Canard du 23.08.18, p.8), il se passe de la pommade en citant Bouvard :

"La France n'est pas une monarchie républicaine mais une canardocracie, (car) c'est le Palmipède satirique qui fait désormais la loi chez nous, en menant des enquêtes et en publiant des documents que les bras séculiers préféreraient garder sous le coude".


Mais de là à dire tout et son contraire, il y a une marge. Dans un article intitulé "Antiterroristes en pleine errance...", le Canard en vient presqu'à regretter que la task force promis par Macron ne soit pas mise en place. Une task force qui soit dit en passant devait permettre au chef de guerre dans sa lutte contre le terrorisme de rassembler sous son aile l'ensemble des services de renseignement sans aucun contrôle parlementaire et gouvernemental. (Sous le régime de la Vème : une task force sous contrôle du chef de guerre sans aucun contrôle parlementaire et gouvernemental).

Dans son numéro du 31 mai 2017, le Canard avait critiqué ce dispositif voulu par le nouveau chef de guerre dans un article intitulé "Macron futur patron d'une cellule antidjihadiste" : (Macron entend créer) "un Centre de coordination des activités des services, qu'il a lui même qualifié de task force élyséenne...Les membres du gouvernement n'auront pas à en débattre, ils seront uniquement invités à ratifier le décret permettant la formation, auprès d'Emmanuel Macron, de cette sorte de cellule antiterroriste".


Dans son édition du 23 aout, dans un article intitulé "Antiterroristes en pleine errance...", c'est un autre son de cloche, il n'est plus fait allusion à la dérive monarchique du nouveau chef de guerre mais l'accent est mis sur le manque de moyens pour créer cette task force avec presque une pointe de regret dans la plume :
"...Le problème, c'est que les moyens ne sont pas au rendez-vous. Lorsque l'Elysée a vendu cette fameuse task force, il était question d'une centaine de fonctionnaires, mobilisables a tout moment, permettant à Macron d'être "informé en temps réel" - afin de prendre "une décision dans les vingt quatre heures". Les ambitions ont vite été réduites à une quarantaine de spécialistes. Plus de deux mois après son lancement, ils sont en tout et pour tout...18. Et, l'effectif ne devrait guère flamber...". En clair 4 mois plus tard Le Canard ne s'interroge plus sur le pouvoir autoritaire et omnipotent sans aucun contrôle démocratique de cette task force mais sur le fait que cela n'aille pas assez vite et ne soit pas budgété suffisamment. Pour autant, on ne peut critiquer le fait qu'il y ait des avis divergents au sein de la rédaction, ni qu'elle puisse en changer au cours du temps, ni qu'elle s'accroche au factuel en oubliant la substantifique moelle démocratique (l'idéologie), là en fait n'est pas le problème. Mais c'est plutôt la fin de l'article qui est plus critiquable :

"...Aux dernières nouvelles, le point de chute parisien (de la task force macronienne, ndlr) pourrait être l'hôtel de Marigny - là où Kadhafi avait planté sa tente. Beau symbole "antiterroriste"...".

Ainsi, tout comme les services de renseignement français et plus généralement atlantistes, le Canard enchaîné stigmatise Kadhafi comme un exemple de terrorisme qui parce qu'il aurait déposé sa tente sous les auspices de Sarkozy à l'hôtel Marigny aurait définitivement contaminé ce lieu. Pourtant à l'époque où il a planté sa tente à l'hôtel Marigny, il semble qu'il luttait ardemment contre le terrorisme d'Al Qaïda et islamiste en Afrique qui par contre, comme le Canard enchaîné l'a révélé à maintes reprises, fut soutenu en Syrie (mais aussi en Libye) par le gouvernement impérial socialiste français (et par le gouvernement très françafricain et atlantiste de Sarkozy dans la même mouvance). D'un Etat laïque libyen nous sommes passés à un Etat en passe de devenir islamiste par la grâce des Occidentaux où les terroristes ont pris leur quartier.

Pour rappel :
- (10.02.2016) Syrie. Al-Quaïda toujours épargné... par la France et les USA (Canard enchaîné)
Al-Quaïda toujours épargné . Canard enchaîné, mercredi 10.02.16
Salafiste et financé par les Saoudiens, Mohamed Allouche, chef de Jaich al-Islam (l'Armée de l'Islam), a dû répondre à une question sur ses relations avec le Front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Quaïda. Le 6 janvier, "Le Monde" a publié sa réponse, à déguster lentement : "Aussi longtemps qu'Al-Nosra combattra le régime (syrien), il y a de la place pour une coopération militaire, mais nous avons des différends idéologiques. Nous avons demandé au Front Al-Nosra de se distancier d'Al-Quaïda. Cela a échoué."Ne reste plus qu'une question, jamais posée aux responsables américains et à François Hollande : pourquoi les pilotes US et français ont-ils reçu l'ordre de ne jamais bombarder ces braves gens d'Al-Quaïda ? On meurt d'envie d'en connaître la raison...


- (20.07.2016) Le Canard enchaîné évoque à nouveau la "complaisance" franco-étatsunienne envers Al-Quaida en Syrie
Une Coopération USA-Poutine en Syrie et en Irak". (Washington propose "un commandement conjoint" pour bombarder Daesh et Al-Nosra,) . Canard enchaîné, le 20.07.16. Page 3.
Jusqu'à présent, si les pilotes de l'US Air Force arrosaient de missiles les positions de Daech, ils avaient ordre de ne jamais toucher à un cheveu d'Al-Nosra. Et les Rafale et Mirage français épargnaient, eux aussi, ces terroristes intouchables, si l'on ose dire. Cette complaisance franco-américaine envers les combattants d'Al-Nosra, aussi cruels que ceux de Daech, mérite une explication. Dans la guerre menée contre l'armée syrienne, "une alliance de circonstance", formule d'un militaire français, s'est constituée, sur le terrain, entre ces partisans d'Al-Quaida et quelques groupes de rebelles, dits modérés, qui rêvaient d'entrer en vainqueurs à Damas et avaient le soutien de Washington et de Paris, où l'on espérait se débarrasser ainsi de Bachar.
Terroristes tolérables
Autre information, partagée, d'ailleurs, avec d'autres médias, et à déguster lentement pour éviter un violent mal de tête : Al-Nosra a des associés dans son combat, les groupes Ahrar Al-Sham et Jaïsh Al-Islam, des terroristes en tout genre financés par nos amis du Qatar, d'Arabie saoudite et de Turquie. A Paris et Washington, personne ne reproche à ses Etats de jouer, depuis bien des années, aux supporteurs du terrorisme.


- (2.11.2016) Le Canard enchaîné confirme qu'Obama et François Hollande soutiennent le groupe terroriste Al-Nosra affilié à Al-Quaïda en Syrie
Nouveaux tours et détours américains en Syrie. Canard enchaîné, 2 novembre 2016.
...Terroristes très épargnés
Face aux djihadistes, la stratégie mise en musique par le Pentagone est plus directe, sans détour, mais jamais défendue publiquement. Sans le dire, Barack Obama et, à sa suite, François Hollande ont choisi, pendant deux ans, de "laisser le Front Al-Nosra prendre des forces et foncer sur Damas", selon la formule d'un diplomate. Peu leur importait que ce mouvement soit la filiale syrienne d'Al-Qaïda et qu'il ait pour associés des groupes salafistes aussi violents que Daech. Les avions américains ne bombardaient jamais ces braves terroristes, les Rafale et les Mirage français non plus. A Washington comme à Paris, aucune explication n'était fournie sur cette complaisance qu'il aurait fallu expliquer ainsi : "Eux seuls peuvent se payer l'armée de Bachar". Difficile à avouer, en effet, et tout autant difficile de reconnaître que ces djihadistes étaient armés par la Turquie, l'Arabie saoudite et le Qatar, nos présumés amis.
David Petraeus, ancien patron des forces américaines en Afghanistan et en Irak, devenu ensuite directeur de la CIA, s'est, lui, montré bien plus franc. Le 31 août 2015, sur le site "The Daily Beast", il avait invité les dirigeants des Etats-Unis à s'allier ouvertement avec Al-Qaïda pour se sortir du bourbier syrien et, accessoirement, vaincre Daech.


- (15.11.2016) D'après le Canard enchaîné, Obama a ordonné de bombarder Al-Quaïda en Syrie après avoir protégé ce groupe terroriste pendant 5 ans
Fin de la neutralité US face aux adeptes d'Al-Qaida. Canard enchaîné, le 16 novembre 2016.
Obama interdisait à la coalition de bombarder Al-Nosra, la filiale syrienne des successeurs de Ben Laden. Obama a donné l'ordre aux généraux américains chargés de planifier les raids de la coalition internationale de ne plus épargner le Front Al-Nosra, alors que, pendant deux ans, il avait interdit tout bombardement des positions de ces djihadistes en Syrie. C'est la conclusion d'un pari manqué. Américains et Français avaient longtemps espéré que cette filiale d'Al-Quaïda pourrait l'emporter sur l'armée syrienne et régler son compte à Bachar. Espoir confirmé, en septembre 2015, quand Al-Nosra et ses alliés salafistes s'approchaient de Damas, mais espoir vite déçu, car Poutine envoyait aussitôt plusieurs dizaines d'avions pilonner ces djihadistes afin de sauver son protégé. Un an plus tard, Obama a changé de stratégie - mais en était-ce vraiment une ?


- (23.11.2016) Selon Le Canard enchaîné, Al-Quaïda en Syrie a été protégé par Obama et Hollande. Faut-il les juger devant la CPI ?
Extrait de l'article "Trump et Fillon futurs interlocuteurs de Poutine ?" (Canard enchaîné, 23.11.16)
...Al-Quaïda trop épargné
Au début de la guerre, Poutine se contentait d'armer et conseiller Bachar, mais, en septembre 2015, il est plus brutalement entré en guerre. Furieux de constater que le Front Al-Nosra s'apprêtait à foncer sur Damas, avec l'accord tacite des Américains et des Français, qui ne bombardaient jamais cette filiale d'Al-Quaïda, Poutine a envoyé une cinquantaine d'avions sauver son protégé...


- (4.01.17) Le Canard enchaîné réaffirme qu'Obama, Fabius et Hollande ont soutenu Al-Quaïda en Syrie
Al-Qaida bien installé en classe terroriste. Canard enchaîné, le 4.01.17
...Dans ce désordre syrien, Obama, Hollande et Fabius ont cru intelligent de choisir celui des groupes terroristes (entre l'Etat islamique et Al-Nosra, ndlr) qui pouvait leur rendre service, pour tout dire. Pendant près de deux ans, les avions de la coalition ont donc bombardé les positions de Daech, et jamais celles du Front Al-Nosra. Avec l'espoir que ces valeureux islamistes radicaux allaient entrer victorieusement dans Damas et y planter le drapeau d'Al-Qaida après en avoir chassé Bachar. Un pari stupide dont aucun n'oserait se flatter aujourd'hui...

La réification de Kadhafi sous les traits du "terroriste" lorsqu'il luttait de manière violente et aveugle contre l'impérialisme occidental en oubliant son action récente de lutte contre le terrorisme islamiste dont on a vu l'impact en Afrique puis en Syrie depuis sa chute a quelque chose de sélectif et de stigmatisant. Si Sarkozy avait soutenu Kadhafi dans sa lutte contre l'extrémisme islamiste plutôt que de lui faire la guerre et de soutenir les rebelles djihadistes, on en serait sans doute pas là et le terrorisme de par le monde ne se serait pas répandu avec l'aval des alliés de la France et de l'OTAN (Qatar, Arabie saoudite). Avec le mauvais humour du Canard, on pourrait aussi dire que le point de chute de cette task force antiterroriste ne devrait pas s'installer à Paris qui n'est pas un beau symbole de la lutte antiterroriste dans le monde, c'est le moins que l'on puisse dire ! A moins d'en changer le nom en task force terroriste au regard du passif du duo Sarkozy-Hollande en Libye et en Syrie ?

Le jour où le Canard demandera une commission d'enquête parlementaire sur le rôle de l'ex-chef de guerre socialiste français et de son prédécesseur dans l'extension du domaine d'influence des groupes djihadistes tels qu'Al Qaïda en Afrique et en Syrie, on en reparlera. Quant à l'idée qu'une commission d'enquête parlementaire française puisse se pencher sur les crimes de guerre commis par la France en Libye autant ne pas y songer. Faut-il juger Sarkozy, Cameron et Obama pour les crimes qu'ils ont commis en Libye en renversant Kadhafi ?

La question qui se pose plus généralement est de savoir qui sont les terroristes et qui les soutient ? Et nous n'épiloguerons pas sur la définition des termes de "terrorisme" et de "résistance" pour ne pas compliquer la réflexion. On ne peut, en l'état des choses se contenter des stigmatisations réductrices au sein de la presse française à l'égard de feu Kadhafi, le "dictateur", qui permettent aussi de masquer à bon compte l'ignominie des actions françaises impérialistes en Libye et ailleurs.

Face à la stigmatisation atlantiste et françafricaine post-mortem de Kadhafi qui se présentait comme le "guide libyen" et maintenait une sécurité et stabilité régionale, écoutons ce qu'il disait aussi au sujet du terrorisme en 1981.

Antiterrorisme. Quand le Canard enchaîné divague sur Kadhafi et le stigmatise sous le signe du terrorisme
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Haut de page